Les Algériens boudent-ils le travail dans le BTP ?



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Les Algériens rechignent-ils à travailler dans le BTP ? Selon le directeur général de l’Agence nationale de l’emploi (Anem), Mohamed Tahar Chaâlal, 32 000 demandeurs d’emploi ont décliné les offres  de recrutement proposées par son agence notamment dans le bâtiment. Selon M. Chaâlal, qui s’exprimait hier sur les ondes de la chaîne I de la Radio nationale, ces refus s’expliquent par plusieurs facteurs dont « la pénibilité de la tâche à effectuer et le salaire » proposé par les entreprises.

«  La seule variable d’ajustement que maîtrisent certains entrepreneurs, notamment du secteur de la construction, est le salaire. Ils ne maîtrisent ni les prix des matériaux de construction, ni les prix des bureaux d’études. C’est pour cela que les salaires sont parfois inférieures à la nature du travail (…) », regrette-t-il. « Naturellement, si le citoyen est amené à faire un choix entre une offre de recrutement en tant que maçon et une autre en tant que gardien pour le même salaire, il optera pour le deuxième choix », justifie-t-il.

Un problème de « spécialisation »

Pour Brahim Hasnaoui, patron du groupe privé de BTP éponyme, la pénurie de la main d’œuvre sur les chantiers algériens est récurrente. Il s’agit avant tout d’un problème de « spécialisation » de la main d’œuvre algérienne « aux nouvelles techniques » de construction utilisées dans le secteur, d’après ses affirmations.

« Le problème n°1 qui se pose, c’est que la main d’œuvre algérienne n’a pas été formée pour travailler avec les nouvelles techniques de construction», pointe M. Hasnaoui.

Face à cette « pénurie » de main d’œuvre, les entreprises algériennes comptent sur le noyau dur des travailleurs fidélisés. « Heureusement qu’on a une main d’œuvre qui est chez nous depuis 35 ans. C’est grâce à cela qu’on arrive à joindre les deux bouts », admet le même patron. Un avis partagé par un autre patron d’une entreprise de BTP de l’Est du pays. « On est obligés d’utiliser les effectifs dont on dispose sur plusieurs chantiers pour faire face à ce manque de main d’œuvre », déclare-t-il.

Mais, la fidélisation des employés ne suffit pas toujours et les jeunes boudent le travail sur les chantiers. Les entreprises sont du coup obligées « souvent » de recourir à la main d’œuvre étrangère pour combler le déficit. « Nous sommes obligés de recruter des ouvriers étrangers », reconnait ce patron.

L’instabilité du secteur

De son côté, le président de l’Association générale des entrepreneurs algériens (AGEA), Mouloud Kheloufi, réfute l’idée selon laquelle les Algériens boudent le travail dans le BTP. Pour lui, le manque de main d’œuvre dans le BTP est dû en premier lieu à « l’instabilité du secteur » en raison de la baisse « de la commande publique ».

« Les Algériens ne boudent pas le travail dans les chantiers. Le problème est lié à l’instabilité du secteur du bâtiment. Aujourd’hui, un entrepreneur peut faire travailler des ouvriers qualifiés sur un chantier. Mais à la fin du chantier, si l’entrepreneur n’entame pas un autre, il sera obligé de libérer les travailleurs et donc ces derniers se disent qu’il n’y a plus d’avenir dans le secteur. Alors, ils l’abandonnent », explique-t-il

Pour lui, le manque de main d’œuvre sur les chantiers algériens n’est pas lié aux salaires « inférieures à la nature du travail », comme l’a dit le directeur général de l’Anem. « Les meilleurs salaires sont dans le BTP. Par exemple, un manœuvre touche presque 1500 DA jour. Donc 45 000 DA net par mois. Il faut y ajouter les charges fiscales et sociales, la restauration et le transport », affirme-t-il.

Selon lui, il s’agit plutôt d’un problème d’organisation du secteur du BTP et plaide pour une meilleure gestion du secteur. « Si les entreprises étaient organisées, on aurait une certaine visibilité, notamment en matière de recensement des ouvriers », avance-t-il.

Pour ce faire,  un programme sera mis en place pour « organiser et moraliser » ce secteur. « Il y a tout un programme pour moraliser et organiser le secteur. Durant la prochaine tripartie, prévue le 6 mars, on va aborder cette organisation, mais aussi le problème de la sécurité des ouvriers sur les chantiers », révèle-t-il.


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