«L’impact est largement négatif avec des répercussions réelles sur l’image et l’attractivité du pays»



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Ahmed Lateb, expert industriel, estime qu’il est encore tôt d’évaluer l’impact  de l’interdiction de l’importation pour certains produits  sur le développement du tissu industriel. Cependant, dans l’immédiat,  ces mesures  ont eu des répercussions réelles sur l’image et l’attractivité  du pays. Des conséquences dues essentiellement selon notre expert à  l’incompréhension suscitée par ces mesures prises sans concertation avec les acteurs des différentes filières. D’où les dysfonctionnements. Pour M. Lateb, le fond du problème provient du fait que la réelle motivation de ces interdictions d’importation est la baisse de la facture des importations plus que la protection du tissu industriel. Pour assurer l’efficacité de telles mesures, il faut accompagner ces décisions par un  plan de  développement de compétitivité des filières et une surveillance sur les prix pour éviter les abus et les créations de monopoles, préconise-t-il. Peut-on faire une première évaluation de l’impact de l’interdiction de certains produits à l’importation sur le tissu industriel ? Il est encore trop tôt pour évaluer l’impact précis de ces mesures d’interdiction sur le développement du tissu industriel. Il faudra sans doute une étude approfondie pour voir quel est l’impact réel de ces mesures sur le développement des industries de substitution locales. En revanche, on peut évoquer les autres impacts sur l’économie et l’image de l’Algérie. Concernant la réduction de la facture des importations, l’impact sera connu à l’occasion de la publication des statistiques des Douanes sur le premier trimestre 2018 en le comparant au même trimestre de l’année dernière. Cette réduction sera limitée, car au lieu d’importer des produits finis, on importera des matières premières nécessaires à la production de ces mêmes produits finis. Donc la réduction de la facture d’importation sera limitée au taux de transformation local dans les industries concernées. Avec un impact négatif sur les recettes de l’Etat, car les matières premières sont généralement exonérées des droits de douane, ce qui n’est pas le cas pour les produits finis. En revanche, en termes d’image, le bilan est lui plus discutable, car les partenaires de l’Algérie ont tous dénoncé des mesures de protectionnisme prises dans l’urgence et sans concertation. Sans doute, ces mesures seront-elles considérées comme points noirs dans les relations avec nos partenaires. On ne peut pas promouvoir l’export, d’un côté, et fermer les importations, de l’autre. Sans compter les allers et retours opérés sur la liste des produits suite à des dysfonctionnements engendrés dans certains secteurs avec des blocages des lignes de production. En conclusion, à l’exception de la réduction de la facture d’importation qui, par ailleurs, sera annulée par les pertes de recettes fiscales, l’impact est largement négatif, avec des répercussions réelles sur l’image et l’attractivité du pays. Dans ce cas, est-ce qu’on peut parler de protectionnisme ? Nos partenaires parlent de mesures de protectionnisme prises de façon unilatérale, alors que les autorités algériennes parlent de mesures de sauvegarde prévues dans les textes de l’Organisation mondiale du commerce. Les deux parties ont raison sur la sémantique. L’incompréhension suscitée par ces mesures réside dans la rapidité de la prise de décision, l’ampleur des secteurs touchés et aussi le mécanisme utilisé, à savoir l’interdiction d’importation, qui est considérée comme une mesure extrême. Si on ajoute le manque d’études précises justifiant ces interdictions, on arrive à la situation de tension et d’incompréhension que suscitent ces mesures. En fait, le fond du problème provient du fait que la réelle motivation de ces interdictions d’importation est la baisse de la facture des importations, plus que la protection du tissu industriel. Car si l’objectif de ces mesures était de protéger et de développer l’industrie nationale, il aurait fallu faire autrement en menant des études d’impact et en associant les filières dans la mise en place de mesures appropriées d’accompagnement et de mise en place de barrières douanières largement acceptées par la communauté internationale. L’actualité récente du commerce international confirme que la meilleure façon de protéger son marché est le relèvement des tarifs douaniers. Malheureusement, nous pilotons notre économie avec des agrégats qui sont inadaptés à l’état de développement de notre économie. Dans une économie en développement et en mutation comme celle de l’Algérie, il est normal que la balance des devises soit négative. Il est également acceptable d’un point de vue économique d’avoir de l’endettement interne et externe. Prendre des décisions sur la base des réserves de change peut freiner le développement de l’industrie avec des effets récessifs et donc un impact sur le déficit budgétaire qui demeure l’indicateur de référence d’une bonne gestion d’un pays. Certains proposent carrément de supprimer cette liste et de passer à d’autres solutions. Qu’en est-il à votre avis ? S’il y a une chose sur laquelle les économistes de tous bords sont unanimes c’est que les mesures de protectionnisme finissent toujours par avoir un impact négatif sur l’économie. Le protectionnisme génère toujours des hausses de prix, une baisse de qualité et favorise la création des monopoles. Cette situation est finalement préjudiciable à l’économie car, tôt au tard, il faudra casser ces monopoles avec des conséquences qui peuvent être parfois dramatiques sur l’emploi et le budget de l’Etat. On peut toujours protéger certaines filières par des mesures sur les importations en imposant des barrières douanières. Pour que ces mesures soient efficaces, il faut les accompagner d’un plan de développement de compétitivité des filières et d’une surveillance sur les prix pour éviter les abus et les créations de monopoles. Le cas du marché automobile constitue un exemple parfait. Avec des licences et des quotas, on a quasiment doublé les prix des véhicules et un bilan global largement négatif sur l’économie nationale et sur les comptes publics. La bonne démarche aurait été d’imposer des tarifs douaniers sur les importations ou des contrôles qualité aux frontières pour favoriser la production locale tout en laissant une libre concurrence sur le marché. Car dans une économie sans concurrence, il n’y a pas de création de richesse, ni de développement économique avec des effets pervers sur l’économie en matière de corruption et distorsions des règles du concurrence. N’y a-t-il pas lieu d’aller vers plus de concertation avec les associations professionnelles des filières industrielles ? Effectivement, pour rendre ces mesures efficaces, il aurait fallu impliquer les acteurs industriels et surtout avoir des approches par filière. En effet, sur certaines filières, l’économie nationale est compétitive et donc ne nécessite pas de mesures de protection. On peut citer toute la filière des matériaux de construction. Sur d’autres filières, des mesures temporaires sont nécessaires pour mettre à niveau les entreprises dans ces secteurs, comme les produits d’équipement de la maison ou la filière agroalimentaire. Sur d’autres secteurs considérés comme stratégiques, on peut décider de protéger certaines filières par des mesures de protection, comme ce qui est fait dans l’industrie pharmaceutique, avec un mécanisme clair, connu par les acteurs et défendable auprès des partenaires. Enfin, il y a des secteurs sur lesquels l’Algérie ne peut pas être compétitive pour des raisons évidentes d’effet de taille de son marché ou de retard technologique, des mesures de protection dans ces filières seront forcément coûteuses pour le budget de l’Etat. On peut citer la filière automobile, pour laquelle on essaie de créer un tissu local de producteurs, mais l’impact sur les ressources de l’Etat est largement négatif. On voit bien que la décision d’interdiction d’importation est une décision extrême qui a des conséquences négatives sur l’économie. La démarche doit être menée par filière avec des mécanismes de protection plus adaptés. Ce qui est largement appliqué comme méthode est celle des droits de douane ou des contrôles qualité lors des opérations d’importation. Enfin, La non-convertibilité du dinar pousse les pouvoirs publics à administrer les opérations d’importation, ce qui ne facilite pas la prise de décision en matière de commerce extérieur.


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