Terrorisme

Nordine Aït Hamouda assène ses vérités au Parlement européen



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Le député Nordine Aït Hamouda n’est pas allé par trente-six chemins pour dénoncer la «passivité» de l’Europe dans la lutte contre le terrorisme islamiste. Nordine Aït Hamouda a usé de son langage direct et franc habituel pour asséner ses quatre vérités : «Je suis sidéré de constater que certains pays de la communauté européenne se trouvent infestés par des terroristes djihadistes qu’ils ont eux-mêmes enfantés». Le député s’en est également pris à «certains journalistes européens» qui «qualifiaient le drame algérien de guerre civile, alors qu’elle était une guerre contre les civils».

Nous publions le discours de Nordine Aït Hamouda dans son intégralité, vu sa pertinence et sa sincérité.

AP

«Bonjour, azul fellawen, salam alikoum,

Je suis ici afin de porter la voix de mon pays et exposer devant vous notre souffrance et notre expérience vécues face à l’hydre terroriste intégriste. Je suis peiné, mais aussi sidéré de constater qu’au moment où nous exposons ce phénomène, certains pays de la communauté européenne se trouvent infestés par des terroristes djihadistes qu’ils ont eux-mêmes enfantés. La passivité et le manque d’anticipation de certains gouvernants européens font qu’aujourd’hui – à titre d’exemple –, la France abrite quelque 1 700 terroristes, la Belgique 470, l’Allemagne 760, la Suède et la Norvège près de 300, etc., et la contamination est presque dans tous les pays de votre communauté.

Mon pays, l’Algérie, a connu le terrorisme des groupes islamiques armés bien avant qu’il se greffe dans ces autres pays. Même si le premier attentat inaugural de la fameuse décennie noire remonte à 1990, les actes de propagande, de radicalisation et de violence ont commencé à la fin des années soixante. L’université et la société civile en étaient les premières cibles. Des actes de sabotage des infrastructures publiques en 1974/75, campagne d’agression à l’acide contre les femmes non-voilées en 1978, création du MIA et constitution des premiers maquis de Bouyali avec l’attaque de l’école de police en 1985, récupération politique des événements d’octobre 1988 et ouverture des camps d’entraînement dans les villes au vu et au su de tout le monde par les combattants afghans d’origine algérienne de retour au pays.

A l’ouverture démocratique de 1989 qui consacrait le multipartisme, ces terroristes en gestation se sont reconvertis en militants politiques en créant le FIS, un parti intégriste qui avait un seul objectif : utiliser la voie démocratique pour arriver au pouvoir, instaurer l’Etat islamique et y demeurer de force. Il sera légalisé.

Le rejet populaire du système incarné par son parti unique exprimé par un vote sanction, a fait que ce parti intégriste «gagne» les élections locales de juin 1990 tout en usant de violence, de chantage et d’intimidation. Il instaure la police islamiste pour surveiller les mœurs des Algériens.

Démocrates et républicains, nous n’avions pas cessé de prévenir contre ce fascisme rampant dont les desseins réels étaient la mise à mort de l’Etat républicain et l’instauration d’un nouveau califat.

En juin 1991, le FIS appelle à la désobéissance civile et l’occupation de la rue. Quand l’armée intervient pour rétablir l’ordre, ce parti ordonne aux fidèles de se constituer en groupes armés et s’attaquer aux édifices de l’Etat et à tous ceux qui s’opposent à l’instauration de l’Etat islamique et l’application intégrale de la charia. Il est donc établi que l’arrêt du processus électoral en janvier 1992 n’a jamais été l’élément déclencheur de la violence intégriste et la constitution des maquis terroristes.

Pendant plus d’une décennie, l’Algérie a été isolée et aucun soutien n’a été apporté à notre peuple qui ne voulait pas abdiquer. Ceux qui assassinaient sauvagement journalistes, intellectuels, syndicalistes, hommes politiques, médecins, hommes de théâtre, chanteurs, jeunes filles refusant de porter le voile, et même des bébés arrachés à leur mère, ont trouvé grâce et accueil dans certaines capitales européennes. Les patriotes résistants qui ont pris les armes pour défendre leur village, leur honneur et prêter main forte aux appelés du Service national pour venir à bout de la bête immonde, étaient, pour certains donneurs de leçons occidentaux et autres revanchards nostalgiques de l’Algérie française, des indésirables.

Je m’honore d’avoir été le principal initiateur de la résistance citoyenne à la tête d’un groupe d’autodéfense en Kabylie. Je suis fier et j’assume l’entière responsabilité d’avoir pris les armes contre ces criminels.

Certains journalistes européens qualifiaient le drame algérien de guerre civile, alors qu’elle était une guerre contre les civils. Tous ces massacres sont commis au vu et au su de tous engendrant plus 200 000 morts et tout le monde est resté aveugle, sourd et muet. Oui, certains gouvernants sont coupables de non-assistance à peuple en danger. Par leur passivité, pour ne pas dire complicité, ils ont fait acte d’atteinte aux droits de l’Homme qu’ils s’évertuent à protéger. Nous avons, certes, payé un lourd tribut, nous avons perdu les meilleurs d’entre nous, mais nous avons résisté et vaincu. Durant sa peine et sa souffrance, le peuple algérien est resté digne ; nous n’avons connu ni exode ni migration de masse pour fuir le terrorisme. Nous sommes un peuple de résistants.

En 2000, l’Algérie a engagé un processus de réconciliation nationale (la concorde civile). Cette mesure a permis la reddition de milliers de terroristes et a contribué à la défaite militaire et politique des terroristes intégristes. Cette initiative déterminante dans le retour à la paix et la stabilité a permis aux Algériens de dépasser ce drame sans oublier, et de réinventer une manière de vivre ensemble en paix dans une Algérie libre, démocratique et sereine. Cette démarche a permis aussi d’engager dans la sérénité d’autres chantiers afin de consolider tous ces acquis. C’est ainsi que des réformes ont été lancées aussi bien pour l’école républicaine, la révision du Code de la famille discriminatoire envers la femme algérienne, l’ouverture économique à la mondialisation et, enfin, la réappropriation de notre identité amazighe (berbère) plusieurs fois millénaire, par sa constitutionnalisation comme langue officielle du peuple algérien.

Mesdames et Messieurs, si je me suis permis une telle rétrospective, c’est pour vous alerter que le combat qui doit être livré à ce fléau s’impose au quotidien, dans tous les domaines d’activité et concerne toute personne dotée d’intelligence et imprégnée des valeurs de liberté et des droits de l’Homme.

Le terrorisme est comme la grippe aviaire ; il ne connaît pas de frontières. En tant que démocrates, il est de notre devoir de protéger la démocratie pour qu’elle ne soit pas un moyen entre les mains des terroristes pour assassiner la démocratie. C’est le laxisme des autorités, le laisser-faire des parents, le mépris des politiques, l’arrogance des journalistes, la tolérance de la société et la négligence de l’école conjugués à la passivité et parfois la complicité des gouvernants qui ont causé la faillite puis l’errance et l’ignorance qui ont fait de notre jeunesse une proie entre les mains des organisations terroristes.

Notre devoir, aujourd’hui, et notre responsabilité à tous est de nous dresser avec force, conviction et détermination contre cette hydre qui sème le deuil et la mort.

Notre vivre-en-paix, notre vivre-ensemble en dépendent.

Je vous remercie pour votre attention.

Nordine Aït Hamouda

Député indépendant

Assemblée populaire nationale

Algérie».

 


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