Abane Ramdane, l'architecte du congrès de la Soummam



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Pour quel objectif et dans quelle perspective le congrès de la Soummam a-t-il été programmé et organisé ? Quel est le rôle véritable d'Abane Ramdane dans l'organisation du congrès ? Pourquoi l'année 1956 pour organiser ce congrès ? Et pourquoi encore Béjaïa (Soummam) et non une autre région pour l'abriter ? Telles sont les principales questions auxquelles le Dr Saïd Khellil a apporté des réponses, hier, à l'occasion d'une conférence qu'il a animée à la maison de la Culture Mouloud-Mammeri de Tizi-Ouzou. Le conférencier a commencé par faire un aperçu sur l'histoire du Mouvement national algérien à partir de 1926, année de création de l'Etoile Nord-Africaine, jusqu'à 1954 où la nouvelle organisation, connue sous l'appellation du « Front de Libération Nationale (FLN) », pourvue d'une aile militaire dénommée Armée de libération nationale (ALN) prit les armes.
Ce mouvement national, selon le conférencier, a marqué sans cesse, dans ses différentes étapes, des avancées vers le principe de l'indépendance nationale, mais a subi aussi des freinages, lesquels étaient causés par des différends entre les différents acteurs.
La dernière organisation à connaître des différends est le CRUA (Comité révolutionnaire pour l'unité et l'action).
Le FLN, par son génie, a su profiter d'un moment d'entente entre les différents acteurs, adeptes inconditionnels de l'indépendance nationale, pour lancer l'action armée.
Toujours est-il, cependant, que la guerre n'était pas structurée. Autrement dit, il manquait des appareils nécessaires pour la conduite de la guerre, et ce, tant sur le plan purement militaire que politique. Et pour dire vrai, le pessimisme a commencé à gagner l'esprit des gens qui avaient pris les armes.


Le congrès était prévu dans le Constantinois
C'est en 1955 qu'Abane Ramdane a été approché par les responsables du FLN pour lui faire un exposé détaillé de la situation et en même temps solliciter ses compétences. Comme il était partie prenante de l'action armée, Abane Ramdane se mit aussitôt au travail.
Le Dr Saïd Khellil a souligné que le congrès devait se tenir initialement dans le Nord-constantinois, mais les conditions sécuritaires n'étaient pas réunies.
Le choix fut porté ensuite sur Béjaïa, plus exactement sur la région des Ath-Abbas. Là encore, le FLN fut obligé de changer de lieu suite à l'emballement du mulet avec des documents en corrélation totale avec la tenue de ce congrès.
Le conférencier a souligné que selon certaines sources, c'est le FLN qui a orchestré délibérément cette opération de fuite de documents, et ce aux fins de détourner l'attention de l'ennemi. Autrement dit, les documents contenaient de faux renseignements et le mulet a été orienté spécialement vers le campement français. « Toujours est-il cependant, expliquera le conférencier, qu'officiellement c'est suite à cette fuite de documents que le choix définitif fur porté sur la Soummam, plus exactement sur le village d'Ifri dans la commune d'Ouzellaguène.
Durant toute la durée du congrès, les forces coloniales étaient tenues éloignées de la Soummam, a indiqué le Dr Saïd Khellil. Concernant les travaux de ce congrès et leur portée, le conférencier a affirmé qu'ils ont été la preuve du génie d'Abane Ramdane. En effet, il a été apporté à la Révolution ce qui lui manquait auparavant, à savoir les différentes structures qui lui étaient indispensables ainsi que la mission et le pouvoir exacts pour chaque structure.

Bras de fer entre l'intérieur et l'extérieur
Le conférencier a également mis en avant les raisons de la non-adhésion de certaines personnalités à ce congrès de la Soummam, à l'instar des défunts Ahmed Ben Bella et Mohamed Boudiaf.
« En revanche Hocine Aït-Ahmed, qui était lui aussi un élément actif à l'extérieur, a donné sa caution au congrès de la Soummam », a indiqué le conférencier pour ensuite mettre en exergue cette partie de bras de fer entre l'intérieur et l'extérieur d'abord, et le militaire et le civil ensuite.
Le Dr Saïd Khellil a souligné que la question du leadership a été de rigueur même après la tenue du congrès de la Soummam. Le différend était tel qu'à un moment les armes et les munitions venaient à manquer dans les maquis, car on a cessé de les rentrer de l'étranger.
C'est aussi pour régler cette question du manque d'armes et de munitions dans les maquis que le colonel Amirouche a voulu se déplacer en Tunisie. Le conférencier est revenu aussi sur la fin tragique de l'architecte du congrès de la Soummam en soulignant que son élimination physique a été décidée et exécuté par des Algériens.
Le Dr Saïd Khellil ne ratera pas aussi cette occasion pour dénoncer ceux qui tentent de falsifier l'histoire, notamment les islamises qui auraient prétendu que Abane Ramdane n'a pas fait la Révolution. « Nous n'accepterons jamais qu'une telle ignominie se produise », a martelé le Dr Saïd Khellil qui a rappelé que de tous temps l'histoire est écrite par le vainqueur.
Ce passage du vainqueur et du vaincu, le conférencier l'a consacré au différend qu'il y a eu entre l'armée des frontières, conduite par feu Houari Boumediène, et celle de l'intérieur, conduite par feu Krim Belkacem. Notons également que le Dr Saïd Khellil a affirmé que c'est Abane Ramdane qui a su ramener certains éléments de Djemiat El Oulama, comme El Bachir Ibrahimi, au FLN.
Il en est de même concernant certains éléments se réclamant de la mouvance communiste. Notons enfin que ce rendez-vous a été initié et programmé par l'Association de wilaya Abane Ramdane pour la Mémoire et l'Histoire en collaboration avec le comité du village Sikh-Oumeddour et la direction de la culture de la wilaya. Ce rendez-vous commémoratif devait se poursuivre par la projection du film « Dhargaz Ammi (C'est un homme mon fils) » du cinéaste Ahcène Osmani. Après la projection du film, la scène devait être occupée par une pléiade d'artistes dont Rabah Ouferhat. Il est également à retenir l'exposition de photos et autres documents historiques et en corrélation avec la guerre d'indépendance nationale dans le hall de la maison de la Culture.


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