Documents exclusifs. Métro d’Alger

Le jour où Ouyahia a accordé d’importants marchés publics de gré à gré aux frères Kouninef



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Les Algériens ne connaissent pas réellement l’influence et la richesse des frères Kouninef. Et pourtant, ces milliardaires qui croupissent à la prison d’El-Harrach depuis la fin du mois d’avril dernier, sont à la tête d’une énorme fortune. Une réussite qu’ils doivent beaucoup au projet du Métro d’Alger. 

C’est, en effet, le groupe familial des Kouninef KOUGC qui avait grandement contribué à la construction de la première extension du métro d’Alger en partenariat avec l’entreprise française des travaux ferroviaires Colas Rail. En effet, en septembre 2012, le contrat d’équipement du système intégral est attribué au groupement franco-algérien CRK composé de Colas Rail et KouGC pour un montant compris entre 85 et 110 millions d’euros et un délai de réalisation accordé de 23 mois, aux dépens du groupement Vinci/Siemens ou du PortugaisTeixeira Duarte.  Ce premier projet permettra aux Kouninef d’entrer dans une nouvelle dimension économique. 

En janvier 2016, le groupe familial des Kouninef KOUGC s’associe à nouveau avec les français Colas Rail pour la construction de deux nouveaux tronçons du métro d’Alger pour 168 millions d’euros. Le montant de ce chantier  était 117 millions d’euros dont 59 millions d’euros pour Colas et tout le reste pour les Kouninef.

Les milliardaires algériens et leurs associés français vont concevoir le nouveau tronçon de 3,6 kilomètres, entre Hai el-Badr et Aïn Naadja, vers le sud de l’agglomération d’Alger, qui s’est s’ajouté à celui inauguré le 4 juillet 2015 entre Hai el-Badr et El Harrach Centre, en allant vers l’est et l’aéroport Houari Boumédiène, qui avait coûté 110 millions d’euros.

Mieux encore, les Kouninef et Colas Rail font d’ailleurs coup double puisque le binôme avait également remporté le chantier de la troisième extension de la ligne initiale. Ce dernier tronçon fait l’objet d’un contrat de 27 millions d’euros en faveur de Colas Rail. Le coût total de ces deux extensions était donc de 168 millions d’euros, dont 86 millions d’euros à l’entreprise française. Et tout le reste pour la puissante famille algérienne. Celle-ci était-elle donc une aussi grande famille d’industriels et de bâtisseurs pour remporter aussi facilement et haut la main de tels marchés publics onéreux ? La question se pose depuis janvier 2016 car à l’époque, les Kouninef ont remporté tous ces marchés grâce à la procédure de gré à gré qui est normalement réservée à des situations particulières selon la réglementation algérienne.

Il faut savoir qu’en janvier 2012, un nouveau décret portant réglementation des marchés publics avait été publié au Journal officiel. Ce décret avait recadré, entre autres, le gré à gré. Il y est ainsi stipulé que l’annulation de toute procédure de passation de marchés publics, ou lorsque les montants des offres sont excessifs, ne constituent pas des cas d’infructuosité.

Il y est ajouté que le service contractant est tenu, dans ces cas, de «relancer» la procédure d’appel d’offres. Le recours par le service contractant au gré à gré après consultation doit se faire sur la base d’un cahier des charges soumis, préalablement au lancement de la consultation, au visa de la commission des marchés compétente. Le décret explique la procédure : si aucune offre ou seulement une offre est réceptionnée ou si, après évaluation des offres reçues, aucune offre ou seulement une offre est préqualifiée techniquement, la procédure de gré à gré après consultation est déclarée infructueuse.

Et si après avoir relancé la procédure d’appel d’offres ou de gré à gré après consultation, il n’est réceptionné ou préqualifié techniquement qu’une seule offre, le service contractant peut, dans ce cas, continuer la procédure d’évaluation de l’offre unique. Pour les offres jugées conformes aux exigences techniques et financières prévues au cahier des charges, la commission d’évaluation des offres, par l’intermédiaire du service contractant, peut demander, par écrit, aux opérateurs économiques consultés, des clarifications ou des précisions sur leurs offres.

Elle peut également leur demander de compléter leurs offres. Le service contractant doit veiller, notamment dans le cas de l’évaluation d’une offre unique, à ce que l’offre retenue réponde aux exigences de qualité, de délai et de prix. Autre aspect, l’attribution provisoire du marché doit faire l’objet d’une publication, dans des conditions bien définies.

Par ailleurs, dans le code des marchés publics algérien, il est clairement expliqué que « la procédure de gré à gré simple est une règle de passation de contrat exceptionnelle »

L’article 43 quant à lui énumère les cas particuliers où il est possible de recourir à ce type de procédure. Il s’agit en premier lieu du cas où le « partenaire contractant unique détient soit une situation monopolistique, soit, à titre exclusif, le procédé technologique retenu par le service contractant ».

Le recours exceptionnel au gré à gré concerne également « les cas d’urgence impérieuse » qui menacent « un bien ou un investissement déjà matérialisé sur le terrain ».

Il est instauré également un encadrement du recours, sans appel d’offres, aux procédures de contrats et bons de commande de prestations, travaux et fournitures, d’un montant limité. Cette procédure permettra aux ordonnateurs de réagir sans difficultés à toute situation urgente.

Il s’avère également licite « dans le cas d’un approvisionnement urgent destiné à sauvegarder le fonctionnement de l’économie ou les besoins essentiels de la population ».

Le gré à gré est également permis dans le cas « d’un projet prioritaire et d’importance nationale ». Il est toutefois soumis, dans ce dernier cas, « à l’accord préalable du conseil des ministres ». Les établissements publics disposant, par un texte législatif ou réglementaire, d’« un droit exclusif pour exercer une mission de service public » sont autorisés à recourir au gré à gré simple.

Enfin, cette procédure est possible pour « promouvoir l’outil national public de production », après accord du conseil des ministres. Mais dans le cas des marchés obtenus par les Kouninef dans le cadre de l’extension du Métro d’Alger, de nombreuses zones d’ombre demeurent mystérieuses car aucune nécessité impérieuse ne dicte à l’Etat algérien d’octroyer rapidement un marché aussi onéreux en plusieurs dizaines de millions d’euros de gré à gré aux Kouninef et leurs associés français. 

Mais au plus haut sommet de l’Etat algérien, les règles et la transparence ne comptent pas puisqu’en décembre 2018, le gouvernement d’Ahmed Ouyahia fait un autre cadeau aux Kouninef et oblige l’entreprise du Métro d’Alger d’accorder les extensions du métro d’Alger depuis El-Harrach vers l’aéroport international d’Alger et l’élargissement de la ligne Alger-Ain Naadja jusqu’à Baraki aux Kouunief et leur fidèle partenaire français. Des projets faramineux qui nécessitaient un immense budget avoisinant les 850 millions d’euros. Ces futures extensions permettront au réseau de métro, d’ici 2020, d’atteindre une longueur de 40 kms, reliant notamment la commune de Dar El Beida (banlieue est d’Alger) à celle de Draria (les hauteurs Ouest d’Alger).

Et là encore, les documents exclusifs obtenus par nos soins au cours de nos investigations démontrent qu’une instruction officielle a été donnée par le gouvernement Ouyahia pour accorder une grande partie de ces marchés publics aux Kouninef et leurs associés français à travers la sempiternelle procédure de gré à gré.

Le 30 janvier 2019, Ahmed Ouyahia a pressé le ministère des Transports d’accélérer les projets d’extension du Métro qui étaient gelés jusque-là en raison de la crise financière provoquée par la chute du baril du pétrole. Ces projets devaient se relancer dans le cadre du gré à gré alors qu’il n’y avait aucune urgence particulière. Mieux encore, l’Etat algérien aurait été gagnant s’il avait ouvert la voie à la concurrence pour étudier toutes les offres des autres groupes internationaux qui veulent concurrencer les Kouninef et leurs associés français. Pourquoi reconduire toujours les mêmes entreprises appartenant aux oligarques proches du clan présidentiel des Bouteflika dans des marchés publics dont l’importance pour le pays est stratégique ? La réponse à cette question semble simple et claire : la priorité des dirigeants algériens était d’enrichir les plus riches, satisfaire les plus puissants au détriment de l’intérêt général et du Trésor Public de l’Etat.


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