Un sigle de plus en plus controversé

Faut-il dissoudre le FLN ?



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La dissolution du Front de libération nationale (FLN) est réclamée par beaucoup d’Algériens, dont des acteurs de la scène politique. Si par le passé c’étaient les formations politiques de l’opposition qui en faisaient la demande, aujourd’hui c’est carrément la puissante Organisation nationale des moudjahidine (ONM) qui porte cette revendication.

Avant-hier, à l’occasion de la commémoration du 20 Août, son secrétaire général par intérim, Mohand Ouamar Benelhadj, a réitéré son appel en direction des responsables du pays pour la mise au musée du sigle FLN. «Nous nous sommes beaucoup exprimés sur le Front de libération nationale et nous avons demandé plusieurs fois aux autorités d’enlever ce symbole du parti. Aujourd’hui, nous réitérons notre demande à l’occasion du 20 Août», a affirmé Mohand Ouamar Benelhadj.

Une déclaration qui a fait réagir les responsables du parti concerné. Dans un communiqué, la direction du FLN y voit «une dérive dangereuse». Elle accuse même le secrétaire général par intérim de l’ONM de «servir des agendas cachés qui se croisent avec d’autres appels qui ont des prolongements à l’étranger, dans l’objectif de réaliser ce que le colonisateur français n’a pas pu faire : dépouiller l’Algérie de sa glorieuse histoire».

Ce n’est pas la première fois que le FLN réagit de la sorte vis-à-vis de cette demande, ancienne faut-il le préciser. Plusieurs partis de l’opposition ont déjà réclamé la «mise au musée» du FLN, qui est, d’après eux, un «symbole» de la Guerre de Libération nationale appartenant à tous les Algériens.

En mars dernier, le secrétaire général du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Mohcine Belabbas, avait lui aussi réitéré son appel pour la «dissolution» du FLN. D’ailleurs, d’après lui, «le FLN, tout comme l’UGTA, l’UNEA entre autres, sont des sigles et symboles du combat du peuple algérien contre le colonialisme qui font partie de la mémoire collective».

Ce mot d’ordre a été repris par les Algériens, à travers toutes les régions du pays, depuis le début du hirak le 22 février dernier. «FLN dégage !» est scandé par les manifestants chaque vendredi.

Les autres partis de l’ex-alliance présidentielle, particulièrement le Rassemblement national démocratique (RND), sont aussi ciblés. Des formations politiques dont les responsables sont aujourd’hui en prison (le dernier secrétaire général du FLN, Djamel Ould Abbès, et Ahmed Ouyahia sont poursuivis pour des affaires liées à la corruption). Le FLN et avec lui le RND sont assimilés au «pouvoir». Ce sont eux qui sont majoritaires au Parlement (APN et Conseil de la nation) et qui, par conséquent, ont voté toutes les lois et amendements de la Constitution… En bref, c’est à travers eux que Bouteflika a gouverné pendant ses 20 ans de règne. Et même après le début de la contestation, le FLN n’a pu effectuer sa mue. Pour remplacer Ould Abbès, il a fait «élire» Mohamed Djemai, qui, il n’y a pas longtemps disait : «N’est pas encore né celui qui tiendra tête à Bouteflika.»

Dissolution du FLN, une exigence pour le passage au «vrai» multipartisme

Au-delà de la position de principe des formations politiques de l’opposition et des citoyens qui sortent dans la rue chaque mardi et vendredi, vis-à-vis de ce parti en raison du rôle important qu’il a joué dans la gestion des affaires du pays depuis l’indépendance – même si tous s’accordent à faire la distinction avec le FLN de la Guerre de Libération nationale – la mise au musée du FLN serait une «nécessité» pour, entre autres, la concrétisation d’un vrai multipartisme, selon des universitaires et politiques.

Dans sa déclaration, Mohand Ouamar Benelhadj a relevé que la loi sur les partis politiques de 1990, amendée en 2012, interdit la reprise d’anciennes appellations.

L’universitaire Rabah Lounici est également allé dans le même sens. D’après lui, le fait que la loi n’a pas été appliquée sur le FLN fait de lui un parti pas comme les autres (lire l’entretien ci-dessous). Etant les «béquilles» du pouvoir, le FLN et le RND captent tous ceux qui veulent avoir leur «part» de la rente. «Ces deux partis sont les béquilles du régime et ne sont qu’une couverture pour la prédation, la rapine et le truquage des élections», a-t-il déclaré.

Professeur de sociologie à l’université de Sétif, Nouri Driss a estimé, dans un entretien paru il y a deux jours dans le quotidien El Khabar, que «le FLN n’est pas un parti politique et n’est pas traité en tant que tel par le pouvoir en place». «Tous les mouvements de contestation, politiques et sociaux, dirigent les feux de la colère vers lui, parce qu’il est considéré comme une partie du pouvoir en place et son outil pour le délitement de la scène politique», a-t-il encore ajouté. Pour lui, «le maintien de ce parti, après l’instauration du multipartisme, a coûté cher à l’Algérie, que ce soit en entravant l’évolution de la scène politique et l’émergence de nouvelles élites, ou en raison du coût énorme de son maintien parce que capter la clientèle du régime nécessite la mise à sa disposition d’avantages moraux, matériels et légaux qui font qu’il soit plus compétitif que les autres partis». L’existence du FLN fausse donc le jeu du multipartisme en raison de ses «accointances» avec le pouvoir en place.

C’est pour donner de la crédibilité à sa démarche, en tentant bien évidemment de répondre, à sa manière, à cette revendication de la population, que le coordinateur du panel de dialogue, Karim Younès, a affirmé à maintes reprises que le FLN et le RND ne prendront pas part au dialogue.

Certains, parmi ceux qui réclament la mise au musée du FLN, citent l’exemple de la Tunisie ou de l’Egypte, où les partis des dirigeants déchus (Ben Ali en Tunisie et Moubarak en Egypte) ont été tout simplement dissous. Le changement ne pouvait se faire avec les mêmes personnels, outils et mécanismes.

En tout cas, mis en difficulté dès le début du soulèvement populaire, en février dernier, le FLN s’était mis en veilleuse pendant quelques semaines, cédant même à un parti minoritaire le poste de président de l’APN, avant d’oser un retour sur la scène politique via son nouveau secrétaire général, en tentant de donner l’image d’une formation débarrassée des membres de la îssaba. La contestation est tellement grande que, jusque-là, ce parti n’a pas pu s’imposer dans le processus actuel. Qu’en sera-t-il dans les mois à venir ? Il est clair que vu la situation actuelle, il serait difficile pour le pouvoir en place d’imposer le FLN en tant qu’acteur majeur dans la résolution de la crise. Face à la volonté de cet appareil de survivre au hirak, il y a la détermination de la population à en finir avec l’un des symboles de la gabegie et de la mauvaise gouvernance. Une bataille rude qui, éventuellement, dessinera les contours de la «nouvelle Algérie».


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