Des lieux de prière chrétiens fermés faute d’autorisation

La liberté de culte de nouveau en question



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tort ou à raison, la fermeture des lieux de culte de la communauté protestante évangélique, représentée par l’EPA (Eglise protestante d’Algérie), donne une mauvaise image du pays : celle d’un Etat où les minorités religieuses sont persécutées.

Depuis une année, au moins 12 lieux de culte appartenant à cette communauté ont été fermés à Tizi Ouzou et Béjaïa, dont trois durant ces dernières 48 heures. Pourtant, légalement, la liberté de l’exercice des cultes autres que musulman est clairement garantie par l’article 42 de la Constitution qui stipule : «La liberté d’exercice du culte est garantie dans le respect de la loi» et l’article 2 de l’ordonnance 06/03, promulguée en 2006, pour fixer les conditions et règles d’exercice des cultes autres que musulman et qui précise : «L’Etat algérien, dont la religion est l’islam, garantit le libre exercice du culte dans le cadre du respect des dispositions de la Constitution, de la présente ordonnance, des lois et règlements en vigueur, de l’ordre public, des bonnes mœurs et des droits et libertés fondamentaux des tiers.»

Cette ordonnance a prévu la création, au niveau du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs, d’une commission nationale du culte, chargée en particulier de «veiller au respect du libre exercice du culte, de prendre en charge les affaires et préoccupations relatives à l’exercice du culte et de donner un avis préalable à l’agrément des associations à caractère religieux».

Elle a également précisé : «L’affectation d’un édifie à l’exercice du culte est soumise à l’avis préalable de la commission nationale de l’exercice des cultes, l’interdiction de toute activité dans des lieux destinés à l’exercice du culte contraire à leur nature et aux objectifs pour lesquels ils sont destinés, que les édifices destinés à l’exercice du culte sont soumis au recensement par l’Etat qui assure leur protection, que l’exercice collectif du culte est organisé par des associations à caractère religieux dont la création, l’agrément et le fonctionnement sont soumis aux dispositions de la loi, que l’exercice collectif du culte se fasse exclusivement dans des édifices destinés à cet effet qui soient ouverts au public et identifiables de l’extérieur, que les manifestations religieuses aient lieu dans des édifices et soient publiques et soumises à une déclaration préalable.» Pour les autorités, «il s’agit de mettre de l’ordre» dans un secteur «très sensible» qui touche à la pratique religieuse.

Epinglée, il y a moins d’une année, par des ONG internationales et surtout le département d’Etat américain sur le non-respect des libertés de culte, l’Algérie a répondu, par la voix de son ministre des Affaires religieuses, à l’époque Mohamed Aïssa, que les lieux de culte fermés sont «des établissements éducatifs, des logements ou des locaux commerciaux transformés, unilatéralement par certaines associations, en lieux de culte et non pas des églises au sens de la loi, et ce, parallèlement à une recrudescence du courant évangéliste et des prolongements extérieurs sans respect des lois de la République».

Le ministre avait mis en garde ceux qui refusent de se soumettre à la loi et expliqué : «Lorsqu’un  »poulailler » est transformé en lieu de culte, cela relève de ce qui a été reproché aux Ahmadis et aux groupes extrémistes et aussi aux dépassements de certains musulmans ici et là, puisque la loi s’applique à tous.»

Contacté, Salah Eddine Chellah, président de l’EPA, se demande pourquoi cet «acharnement» uniquement contre l’Eglise protestante évangélique. «Ils exigent de nous un agrément de la commission nationale du culte, alors qu’elle n’a jamais exercé depuis 13 ans. Il y a une année, trois de nos églises à Oran ont été fermées, sans aucune raison, puis rouvertes quelques jours après, sans que nous intervenions à ce sujet. Mais, après cela a été l’escalade. A ce jour, nous sommes à la 12e décision de fermeture et durant les dernières 48 heures, trois lieux de culte ont été fermés à Tizi Ouzou et à Béjaïa. Le problème n’est nullement lié au respect de la loi. Nous avons présenté un dossier complet, comme l’exige la réglementation, et déposé au niveau de la wilaya, mais aucune réponse ne nous a été donnée. A Makouda, on nous a demandé de créer une association. Nous l’avons fait, mais à ce jour, notre procédure n’a pas connu de suite.

A Akbou, nous avons aussi demandé l’autorisation pour l’ouverture d’un lieu de culte, avec un dossier complet, mais c’est resté dans les tiroirs. Aucune réponse ne nous a été adressée», explique Salah Chellah. Notre interlocuteur dénonce «les violences exercées par les policiers», mardi dernier, contre les membres de sa communauté, à Tizi Ouzou, lors de la fermeture d’un lieu de culte, tout en reconnaissant qu’à Béjaïa, l’intervention «s’est passée dans le respect de la loi». «Nous avons épuisé toutes les voies administratives pour faire valoir nos droits, en vain. Les portes du dialogue ont malheureusement été fermées par les autorités.»

Très déçu, Salah Chellah se demande : «Comment voulez-vous que les gens n’aillent pas exercer leur culte dans leurs maisons ou garages, lorsque l’administration leur refuse le droit d’avoir une église. Cette commission chargée de veiller au respect de l’exercice du culte autre que musulman n’a jamais existé. Elle existe sur le papier et non pas sur le terrain. Nous aurions aimé voir ses représentants, mais cela n’a jamais été possible. Tous nos lieux sont connus. Nous n’exerçons pas dans la clandestinité. Mais cela n’a pas empêché les autorités de nous sanctionner. A Béjaïa, nous avons perdu cinq églises affiliées à Aït Melikèche (Tazmalt), Akbou, Ighram, Riquet et Ighzer Amokrane, sans compter celles de Tizi Ouzou, en l’espace d’un temps très court et cette campagne semble s’accélérer.»

Les propos de Salah Chellah laissent perplexe, surtout qu’effectivement sa communauté est la seule qui, depuis plusieurs mois, fait l’objet de fermeture de ses lieux de culte. On s’interroge cependant sur le rôle de cette commission chargée de veiller au respect de l’exercice du culte, restée à ce jour muette et dont les membres ne sont pas connus. Dans toutes nos démarches, il nous a été impossible de prendre attache avec ces derniers. «Elle n’a jamais été effective sur le terrain. Ses activités sont quasiment gelées», nous déclare une source proche du ministère des Affaires religieuses.

Dans un contexte pareil, peut-on reprocher à des Algériens non musulmans d’exercer leur culte dans l’illégalité ? Comment l’Etat peut-il protéger la liberté d’exercer ce culte, comme il le signifie dans la loi, s’il ne met pas en place les mécanismes légaux nécessaires ? En attendant des réponses, il n’est pas exclu que d’autres lieux de culte soient investis par les forces de sécurité, surtout que des préavis de fermeture ont déjà été transmis aux concernés. 


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