Procès des ex-dirigeants politiques

Un test pour la justice



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Prévu aujourd’hui, au tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, après un ajournement de 48 heures, le premier «grand» procès – deux ex-Premiers ministres, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal ; trois ex-ministres de l’Industrie, Abdessalem Bouchouareb (en fuite à l’étranger) Youcef Yousfi, Mahdjoub Beda ; l’ex-ministre des Travaux publics Abdelghani Zaalane ; ainsi qu’un ancien wali de Tipasa, Nouria Zerhouni, et trois hommes d’affaires, Hassane Larbaoui, patron du groupe KIA Motors Algérie ; Mohamed Bairi, patron du groupe Ival ; et Ahmed Mazouz, propriétaire du groupe qui porte son nom – met la justice à rude épreuve.

Juger un tel dossier, émaillé de nombreux vices de forme, en l’absence des avocats et dans une ambiance d’émeute, risque d’entacher la crédibilité et l’indépendance de la justice. Dès son ouverture lundi dernier, le procès a été perturbé par une pagaille indescriptible, marquée par des scènes hallucinantes d’envahissement du hall du tribunal par une foule compacte de curieux et d’hystériques – en dépit d’un imposant service d’ordre – et de violentes bousculades provoquées par un mur de policiers dressé devant la porte de la salle d’audience, interdite aux journalistes.

«Nous ne pouvions même pas nous entendre. De nombreux avocats ont dû être escortés par des policiers pour pouvoir rejoindre l’audience. C’est inacceptable de tenir un procès dans de telles conditions», avait lancé le bâtonnier de Blida, Me Mejdouba, lors de la réunion du collectif d’avocats tenue lundi dernier. Déjà, dès dimanche, le collectif de défense des sept fonctionnaires de l’Etat s’est entendue pour demander le renvoi du procès en raison de la «programmation très rapide des affaires».

Le lendemain, les avocats, sidérés par les conditions dans lesquelles se tient le procès, choqués par la décision de faire jonction entre les quatre dossiers et en colère contre «les nombreux vices de forme ayant émaillé la procédure», ont décidé de quitter la salle d’audience en signe de protestation contre ce qu’ils qualifient de «procès politique expéditif et revanchard».

Mais, le tribunal les surprend en décidant un ajournement de 48 heures. Pour la défense, la décision est qualifiée de «référé pénal» contre lequel elle s’insurge et décide de boycotter l’audience prévue aujourd’hui. «Les prévenus ont droit à un procès équitable dans la sérénité. Or, ce n’est nullement le cas», déclare Me Abdellah Haboul, qui explique : «La Cour suprême a renvoyé l’affaire des hauts fonctionnaires de l’Etat, le jeudi 20 novembre et en deux heures, elle l’a programmée devant le tribunal correctionnel. Or, la loi donne le droit au ministère public de faire appel contre cette ordonnance. Elle prévoit un délai de trois jours pour le procureur et 30 jours pour le procureur général. Cette loi n’a pas été respectée. Les affaires ont été rapidement enrôlées et les avocats n’ont même pas eu le temps de lire le dossier et de préparer la défense. Autre violation de la procédure : cette jonction entre quatre dossiers. Le juge ne peut pas prendre une telle décision sans un débat contradictoire. Dans le dossier de la Cour suprême, les sept responsables sont des prévenus et les hommes d’affaires sont des témoins. Dans chacun des trois autres dossiers, les anciens ministres et premiers ministres sont des témoins. Comment peut-on gérer cela ? Pourquoi autant de rapidité et de non-respect de la loi ?» Me Haboul ajoute que le report de 48 heures s’apparente à un «référé pénal».

Le juge, souligne-t-il, n’a pas respecté la loi organique relative à l’organisation judiciaire, notamment ses articles liés à la fixation des audiences. «Il y a un véritable problème de violation de la procédure», précise l’avocat. Pour lui, le procès d’aujourd’hui se tiendra sans la défense et en présence de prévenus qui useront de leur droit de garder le silence et de rester attachés à leurs avocats. «Le tribunal n’est pas obligé de juger l’affaire dans le cas où il n’est pas responsable des erreurs commises. Or, la défense n’est pas responsable de toutes les violations de la procédure. Elle ne demande que le respect de la loi. Le tribunal se trouve dans l’obligation de renvoyer l’affaire pour donner aux avocats ce délai raisonnable, ni court ni excessif, comme le stipule la loi, pour pouvoir préparer leur stratégie de défense. Comme nul ne peut se prévaloir de ses turpitudes, la solution est dans le renvoi. S’il décide de juger le dossier, les conséquences seront politiques et gravissimes.»

Ces appréhensions sont partagées par de nombreux avocats avec lesquels nous nous sommes entretenus. Pour eux, «la justice est devant un tournant décisif. Un tel procès ne peut avoir lieu dans le contexte politique actuel, marqué par une interférence flagrante du garde des Sceaux dans les affaires de justice». «Si Ouyahia, Sellal et les autres ministres doivent être condamnés, ils le seront, mais à l’issue d’un procès équitable, juste et serein. C’est ce que réclame la défense», déclare Me Abdelmadjid Sellini, bâtonnier d’Alger.


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