Rami Bensebaini ouvre son cœur au Buteur

«Belmadi, les Hommes et Darguez, il aime passionnément l’Equipe nationale, il est capable de se sacrifier pour l’Algérie»



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«Une fierté que Mahrez soit parmi les 10 meilleurs joueurs au monde»

La chaîne El-Heddaf TV est allée à la rencontre de Rami Bensebaïni au centre d’entraînement du Borussia Mönchengladbach. L’enfant de Cirta nous a ouvert grandement son cœur pour nous parler de sa vie professionnelle, notamment avec l’Equipe nationale. Le joueur est revenu aussi sur la dernière CAN remportée en Egypte et sur sa nouvelle expérience allemande. Bensebaïni a parlé de Mahrez et de pas mal d’autres sujets.

Bonjour Rami. Merci de nous avoir accueilli ici en Allemagne.
Bonjour. Vous êtes les bienvenus et j’espère qu’on passera ensemble des moments agréables.
Commençons avec votre nouvelle expérience en Allemagne, après celle vécue en France avec le FC Rennes. Comment s’est passée votre adaptation au sein du prestigieux club du Borussia Mönchengladbach ?
Au départ, ce n’était pas facile puisque je ne maîtrisais pas l’allemand. Heureusement qu’il y avait des joueurs francophones et un interprète qui m’ont facilité la tâche à l’entraînement. Mais je peux avouer que les choses fonctionnent à merveille et tout se passe convenablement. J’ai un appartement et des amis que je retrouve parfois pour sortir ensemble. Ils maîtrisent le français et jusqu’à présent, Dieu merci.   
Quelle est la différence entre les championnats français et allemand, notamment sur le plan technico-tactique ?
J’estime qu’il y a une différence entre les deux championnats. D’abord, au niveau de la pression sur l’adversaire dans son camp ainsi que sur le plan physique. La tension et le rythme sont très élevés en Bundesliga, contrairement à la Ligue 1. A Rennes, nous avions une bonne équipe qui joue très bien au football mais ici avec Mönchengladbach, les choses sont entièrement différentes. Nous avons aussi une meilleure formation avec un grand rythme mais surtout nous sommes obligés de galoper durant tout le match (rire).
Vous attendiez-vous à ce rythme et à cette méthode de jeu, avant de venir en Allemagne ?
Non, pas du tout. J’ignorais l’équipe et son coach et je n’avais pas une idée précise sur le club. Le premier jour d’entrainement, le coach m’a dit qu’en tant que défenseur de couloir, je devais impérativement sortir de ma coquille pour contribuer au jeu offensif de l’équipe. Il m’a incité à presser l’adversaire sans ballon. Au départ, les choses étaient compliquées mais maintenant je me suis habitué.
Appréhendiez-vous votre nouvelle expérience ?
Non, je n’avais aucune crainte. Plutôt, je n’étais pas heureux car je ne maîtrisais pas les exercices et le discours de l’entraineur, même si je ne comprends toujours pas. C’était prévisible pour un joueur qui a gagné la Coupe de France et qui était bien entouré à Rennes. Du coup, je pars dans l’inconnu où la langue joue un rôle déterminant.
On peut dire que vous étiez en position de force lors de votre  engagement avec le Borussia Mönchengladbach. Est-ce qu’on vous parle ici en Allemagne de votre consécration avec l’EN ?
Certainement. La CAN m’a beaucoup aidé et surtout m’a ouvert d’autres horizons. D’ailleurs, j’ai reçu pas mal d’offres après la Coupe d’Afrique. Je me souviens très bien lorsque j’ai reçu un appel de l’entraîneur de Mönchengladbach, à l’issue du match contre la Guinée. Il m’a fait savoir que son équipe voulait s’attacher mes services et qu’il voulait vite me recruter. Il m’a dit aussi de bien terminer la CAN et donner le meilleur de moi-même. Ensuite, c’est aux dirigeants de Mönchengladbach de négocier avec Rennes.
Quand on évoque le trophée de la CAN 2019, quelle est la chose qui vous vient à l’esprit ?
La première chose… le penalty de Baghdad Bounedjah…
Pourquoi spécialement le penalty de Bounedjah ?
Je ne sais pas. C’était un match difficile et compliqué face à la Côte d’Ivoire. Si nous avions transformé le penalty, on aurait tué le match et si on le ratait, on donnait l’occasion à l’adversaire de revenir dans le match. Mais il l’a raté. Les Ivoiriens ont réussi à égaliser et nous étions épuisés. Par la suite, on était allés aux prolongations…
Certainement, vous vous rappelez de ses larmes sur le banc des remplaçants après chaque instant ou attaque de l’adversaire…
Tout à fait. Nous avons un groupe privé du WhatsApp, on partage des moments agréables et on échange les messages.
Vous avez certainement partagé des photos de Bounedjah…
Il y a tout dans ces discussions au WhasApp (rire).
Le peuple algérien a commencé à croire au rêve au fil des matches. Qu’en est-il de vous les joueurs. Comment a commencé votre rêve de décrocher la deuxième étoile ?
Sincèrement, l’entraîneur Djamel Belmadi nous a dit avant la phase finale au Caire que nous allions effectuer le déplacement en Egypte pour ramener la Coupe d’Afrique. Naturellement, nous les joueurs, on l’a soutenu. S’il s’engage dans une guerre, nous serons ses armes. J’ai vécu une petite expérience lors de la CAN 2017 où l’EN était passée à côté et a été éliminée au premier tour. C’était pénible surtout avec le changement des entraineurs et l’absence des résultats. Mais depuis l’arrivée de Belmadi, les choses sont devenues totalement différentes. J’étais persuadé que nous étions capables de gagner la CAN.
Justement, quand étiez-vous convaincus que vous alliez soulever le trophée ?
Au fil des rencontres et surtout lorsque vous terminez le premier tour en tête du groupe avec 9 points et autant de buts marqués sans encaisser le moindre but. C’était fabuleux. Au fond de nous-mêmes, on croyait fortement que si l’on continuait sur la même lancée, nous étions capables d’aller en finale. Petit à petit, le rêve a grandi et nous avons battu la Guinée, avant de passer le cap des Eléphants.
Le match face à la Côte d’Ivoire vous a fait prendre conscience que l’EN pouvait largement gagner la CAN, n’est-ce pas ?
Oui, oui. Comme je l’ai dit, c’était d’abord le match face à la Guinée puis celui contre les Ivoiriens. Sincèrement, nous étions en mesure de battre n’importe quel adversaire, quel que soit son poids et sa valeur.  
Quel a été le match le plus pénible lors de cette CAN ?
La Côte d’Ivoire !
Pourquoi ?
D’abord, on ne s’attendait pas à leur réaction. Ils ont affiché une forme éblouissante et se sont réveillés face à l’Algérie. Tout le monde a vu que les Eléphants n’avaient rien montré face au Mali mais ils se sont ressaisis contre nous. Nous avons ouvert la marque mais le penalty raté leur a permis d’égaliser et de reprendre confiance. Nous étions épuisés lors des prolongations mais le cœur et la volonté ont fait la différence.
Vous étiez chargé de museler l’attaquant ivoirien Zaha. Comment ça passé avec lui ?
Ce n’était pas une tâche aisée face à un bon attaquant comme Zaha.  J’ai tenu à appliquer les consignes de l’entraineur et je me suis donné à fond.
Zaha s’est énervé et a perdu son sang-froid…
Non, c’est moi qui ai tenté de l’influencer sur l’action de Benlamri. Je suis venu rapidement pour le bousculer par derrière, pour l’énerver.
Ce sont les directives de Belmadi afin de déstabiliser l’adversaire ?
Non, au contraire. Belamdi me rappelle à l’ordre et me demande de me calmer pour éviter les cartons.
Parlons de Belmadi. Son premier challenge été de vous reconvertir en arrière latéral gauche. Quelle a été votre réaction lorsque vous avez appris l’information de l’entraineur ?
Belamdi est comme un père pour moi.  Il m’a dit qu’il comptait sur moi sur le côté gauche de la défense et que je devais ainsi lui prouver qu’il n’avait pas tort. J’étais en super forme et je savais que les critiques font partie du football. Mais sincèrement, je n’ai pas bronché.
Etes-vous à l’aise sur le flanc gauche de la défense ou vous souhaitez rejouer dans l’axe ?
Non, je suis très à l’aise à gauche.
Pourquoi ?
Pour la simple raison que je touche beaucoup de ballons et que je participe énormément au jeu offensif.
Quand on prononce le nom de Belmadi, vous pensez à quoi ?
Les Hommes et Darguez. Il n’a peur de rien et assume complétement ses actes et ses dires.
Qu’a-t-il ramené Belmadi à l’Equipe nationale ?
Il a ramené l’esprit de vaincre, la grinta et la volonté. Avec lui, on entame nos matchs avec l’envie de gagner. Il n’y a pas de match officiel ou amical, le plus important est de vaincre. On ne s’intéresse pas à autre chose même si parfois on trébuche alors que nous n’avons pas l’habitude. Si on concède un faux pas, c’est seulement à cause de la solidité de notre adversaire. On ne triche jamais et le groupe ne lâche rien.
Quelle est la différence entre Belamdi et les autres entraineurs avec lesquels vous avez travaillé ?
(Rire), Belmadi a quelque chose de très fort, c’est d’aimer sa patrie. Vous sentez toujours qu’il est capable de se sacrifier pour l’Algérie. Une particularité qu’on ne voyait pas chez les autres entraîneurs.
Il a transmis sa hargne transformée aux joueurs sur le terrain et nous avons vu certains en larmes sur le banc des remplaçants…
Certainement. Si j’étais à sa place, j’aurais aimé avoir des joueurs capables d’assumer une guerre avec moi sans la moindre hésitation. Belmadi est un homme avec un grand H et il a trouvé des Hommes avec lui. Des joueurs auxquels il fait confiance. Dieu merci, il est fier de ce qu’il a réalisé. Il a redonné le sourire aux Algériens et les a rendus fiers de leur Equipe nationale.
Quel a été votre sentiment au coup de sifflet final du match contre le Sénégal ?
Je ne vous cache pas que tous les joueurs étaient dans les nuages. C’était fabuleux et incroyable. Ce n’est qu’en arrivant au pays que nous avons réalisé ce que nous avions réalisé. Nous avons trouvé des milliers d’Algériens à notre accueil.
Justement, quel était votre sentiment de voir le peuple à votre accueil ?
Je n’arrive pas à exprimer mes sentiments, après tout ce qu’on a vécu lorsque nous avons atterri à Alger. C’était incroyable de voir tout le peuple à l’accueil. Nous avons fait le tour d’Alger en plus de sept heures alors qu’on nous avait dit que ça allait prendre deux heures seulement (rire).
La joie des Algériens était indescriptible. Des supporters se sont déplacés en force en Egypte pour vous soutenir. Vous avez certainement ressenti la chaleur des Algériens…
Sans l’ombre d’un doute. On sait parfaitement que le peuple algérien respire le football et qu’il aime son Equipe nationale. Certains ont même dit que l’Equipe nationale a fait oublier au peuple ses déboires et les problèmes du pays. Si nous sommes en mesure de donner encore la joie au peuple, on le fera avec beaucoup de fierté.
La joie s’est emparée des 48 wilayas, notamment votre ville natale Constantine. El-Heddaf TV s’est déplacé chez vous et a vécu l’ambiance avec les membres de votre famille. Quel était votre sentiment lorsque vous êtes rentré à la maison avec le trophée ?
J’ai parlé avec ma famille à l’issue de la consécration durant le trajet qui mène du stade à l’hôtel. Le trophée était entre mes mains. Je n’arrive pas à décrire l’ambiance au sein du groupe, après avoir soulevé le trophée. D’ailleurs, je ne pouvais pas entendre les membres de ma famille, à cause de la joie hystérique de mes coéquipiers dans le bus.
Le rêve de tout enfant est de devenir un grand joueur, comme vous l’avez fait avec Atal, Bounedjah, Slimani, Belaili et d’autres joueurs issus du championnat national. Comment est la relation entre vous les joueurs ?
Il est vrai que les joueurs sont comme des frères. Je passe mes vacances avec Atal et Bounedjah sans omettre Djamel Benlamri et Youcef Belaili. On est toujours en contact et l’EN pour moi est ma deuxième famille. Le secret de notre consécration, c’est cet esprit de famille et l’absence totale des clans. Auparavant, on parlait de joueur local et professionnel mais maintenant, ce n’est plus le cas. Celui qui est capable d’apporter un plus à l’EN est le bienvenu. Si le coach voit qu’un joueur est en méforme, il le met sur le banc et compte ainsi sur un autre plus performant.
Le prochain challenge, c’est la qualification pour la CAN 2021. Vous avez gagné deux matches avec l’esprit de la CAN 2019. Quel en est le secret ?
Quand vous gagnez la Coupe d’Afrique, vous êtes contraint de défendre crânement votre statut et celui de la sélection. Nous n’avons pas le droit de passer à côté de la plaque. Belmadi nous a parlé et nous a dit que la page de la CAN 2019 est entièrement tournée. Désormais, il faut penser aux éliminatoires de la CAN 2021 et on doit garder cette bonne dynamique.
L’équipe d’Italie a sollicité la FAF pour un match amical. Que pensez-vous ?
Evidemment. Nous sommes prêts à l’affronter et je sais que Belmadi ne refusera pas l’idée. C’est extraordinaire de jouer contre l’Italie.
Un mot pour Mahrez, le 10e meilleur joueur au monde ?
Un grand honneur et une fierté pour nous et tout le peuple algérien. Inch’Allah, il viendra le jour où Mahrez décrochera le Ballon d’or. Même ce n’est pas lui, j’espère qu’un joueur algérien puisse décrocher cette distinction. Ce sera un honneur pour l’Algérie.
Vous êtes issu de l’Académie du Paradou, tout comme Youcef Atal. Que pensez-vous des gens qui critiquent le PAC et la formation au sein de cette école ?
Effectivement, on entend souvent critiquer le PAC. A ces gens, je leur dis de faire quelque chose de mieux et de construire des écoles aux jeunes Algériens.
Un mot sur Kheireddine Zetchi ?
Je le remercie énormément car il me suivait depuis mon jeune âge. J’ai grandi avec eux au Paradou. Je le remercie pour tout ce qu’il a fait et je prie Dieu de le récompenser. Je le remercie pour ce qu’il a donné à l’EN.
CSC ou MOC ?
CSC.
Que pensez-vous de l’équipe cette saison ?
Le CSC est l’équipe de cœur. Qu’il joue en est Ligue 1, 2 ou 3, peu importe, le plus important est l’amour du club.
Le CSC porte les mêmes couleurs que le Borussia Mönchengladbach…
J’ai choisi le maillot 25 en honneur à ma ville de Constantine.
Que représente la ville de Cirta pour Rami ?
La fierté. J’essaye de bien représenter la ville et ses habitants mais aussi mes parents ainsi que l’Algérie.  
L’Algérie ?
Une grande fierté. Tout le monde sait que l’Algérien est toujours fier de sa nationalité. Ici en Allemagne, on me dit que je ne m’énerve pas rapidement alors que les Algériens ont le sang chaud…
Merci Rami de nous avoir accueilli en Allemagne. Pour clore, un message au public algérien…
Inch’Allah, on se qualifiera à la CAN 2021 et à la Coupe du monde 2022.  Je remercie les Algériens pour leur solidarité lors de la dernière CAN. Sans eux, on ne pouvait rien réaliser. Rendez-vous lors des prochains matchs qualificatifs.

 

 


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