Procès de Kamel Chikhi renvoyé au 26 février

 Un report et de lourdes interrogations



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Alors que tout le monde attendait le procès de Kamel Chikhi, lié à ses activités immobilières et où il comparait avec six autres prévenus, dont Khaled Tebboune, fils du chef de l’Etat, le président du tribunal de Sidi M’hamed annonce le renvoi de l’examen de l’affaire au 26 février en raison d’«un problème technique lors de l’extraction des prévenus de la prison d’El Harrach». En fait, une contre-décision de leur transfert au tribunal est tombée à la dernière minute pour des raisons inconnues.

Comme à chaque procès de Kamel Chikhi, principal accusé dans l’affaire des 701 kg de cocaïne encore en instruction, un dispositif impressionnant de policiers et de gendarmes est déployé autour de l’imposant palais de justice Abane Ramdane, qui abrite le tribunal de Sidi M’hamed, à Alger.

Dès 9h, le juge a prononcé les délibérés des affaires qu’il a eu à juger puis levé l’audience en attendant, dit-il, l’arrivée des détenus. Il est déjà 10h30 et les avocats s’impatientent, mais les prévenus ne sont toujours pas là. Vers 11h, Chakib Hamel, fils de l’ancien patron de la police, Abdelghani Hamel, fait son apparition dans la salle, escorté par deux gendarmes.

Placé en détention à la prison de Koléa, dans le cadre de l’affaire de son père, il est cité comme témoin dans ce dossier. Une demi-heure plus tard, le juge reprend l’audience. Il surprend l’assistance en annonçant que celle-ci va être renvoyée en raison d’«un problème technique survenu lors de l’extraction des détenus de la prison d’El Harrach».

Il fait l’appel de plus d’une dizaine de témoins, cités dans le procès et parmi lesquels Ahmed Kara, journaliste d’une chaîne de télévision privée, Hamza Abdelmoumen, Adel Yazi, Dekkar Mohamed, Mohamed Haloz, Djillali Boudalia, ancien directeur des Renseignements généraux au niveau de la Sûreté nationale, mais aussi de nombreux policiers, puis les informe que procès est renvoyé au 26 février.

Pour les avocats, c’est la surprise. Ils étaient nombreux à être convaincus que le procès ne connaîtrait pas de report. Que s’est-il donc passé ? Pourquoi les détenus n’ont-ils pas été transférés de la prison d’El Harrach au tribunal de Sidi M’hamed ?

Certains avocats font le lien avec la tentative de mutinerie qui a eu lieu à la prison de Tazoult, à Batna, durant la nuit de mardi à hier, menée, nous dit-on, par des détenus mécontents de leur exclusion de la grâce présidentielle. «Le dispositif de sécurité a dû être renforcé après un tel incident dans toutes les prisons. Ce qui a retardé leur transfert», nous explique un avocat. D’autres, par contre, écartent cet avis et préfèrent lier ce renvoi à ce qui se passe en haut lieu.

«Le permis d’extraction était signé et, à la dernière minute, il y a eu une décision contraire. Par qui et pourquoi ? C’est encore trop tôt pour le dire», déclare un avocat d’un des détenus.

En tout état de cause, ce renvoi laisse perplexe et suscite de lourdes interrogations. Il faut dire que cette affaire est exceptionnelle. Non pas parce qu’elle concerne Kamel Chikhi, ce magnat de l’immobilier et accusé principal dans le dossier des 701 kg de cocaïne, saisis au port d’Oran en mai 2018, mais en raison de la présence de Khaled Tebboune, le fils du président de la République, parmi les sept inculpés en détention, dont Kamel Chikhi, Kamel Bouaraba, ex-maire de Ben Aknoun (et non pas Yacine Benamer comme annoncé par erreur dans notre édition de lundi dernier), Mohamed Jajal Lemhel, fils d’un ancien wali de Relizane, Hadef Meslem, ex-procureur de Boudouaou, son adjoint, Youcef Seddik, et Abdelkader Benzahra, chauffeur personnel de l’ancien patron de la police, Abdelghani Hamel, tous poursuivis pour plusieurs chefs d’inculpation dont «trafic d’influence», «abus de fonction», «perception d’indus cadeaux» et «corruption». Elle a connu plusieurs péripéties.

D’abord au niveau de l’instruction lorsque le juge a décidé de correctionnaliser les faits. Le procureur a fait appel auprès de la chambre d’accusation, mais celle-ci l’a débouté. Il se pourvoit alors en cassation devant la Cour suprême, où le dossier peine à être examiné.

Concours de circonstances ou pas, cette haute juridiction ne statue qu’après l’élection de Tebboune à la tête de l’Etat. Elle donne raison au juge et renvoie l’affaire devant le tribunal, lequel l’enrôle en moins d’une semaine. Une célérité très rare en matière de programmation des procès. Il est clair que pour les autorités judiciaires, ce dossier est comme une épine dont il faut se débarrasser, même si, comme le précisent de nombreux avocats, «son contenu est très léger».


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