Tebboune s’exprime sur la révision de la constitution

«Seules l’unité et l’identité nationales ne peuvent être touchées»



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Les membres du comité d’experts institué à l’effet de se pencher sur la révision de la Constitution n’ont pas de ligne rouge, hormis ce qui a trait à l’unité et à l’identité nationales.

C’est ce qu’a affirmé, hier, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, dans un discours prononcé à l’ouverture de la rencontre gouvernement-walis, qui s’est ouverte au Palais des nations de Club des Pins et qui doit se poursuivre aujourd’hui. «En écoutant récemment un exposé du président du comité d’experts chargé de formuler des propositions pour une révision constitutionnelle, Ahmed Laraba, sur ce qui a été concrétisé à ce jour dans ce domaine, j’ai insisté sur le fait qu’il n’existe aucune restriction, hormis ce qui a trait à l’unité et à l’identité nationales», a-t-il déclaré à cet effet, avant de rappeler que le document aussitôt finalisé sera soumis au débat et que tout un chacun aura la latitude d’émettre un avis «positif ou négatif». Les observations exprimées seront, par la suite, transmises audit comité pour y être traitées.

Tout cela, a-t-il ajouté, afin que «la Constitution soit consensuelle». Pour le Président, la nouvelle Constitution qui sera adoptée interviendra «dans le cadre de la nouvelle politique» qu’il veut adopter «pour opérer le changement». «Nous devons bâtir ensemble une démocratie réelle et solide, non conjoncturelle et pas sur mesure», a-t-il ajouté. Selon lui, la prochaine Loi fondamentale du pays «consacrera la séparation des pouvoirs pour définir les missions de chacun».

Ce qui va permettre «de rompre avec les anciennes pratiques et les dérapages de l’autocratie». Dans ce sillage, le chef de l’Etat a évoqué la création d’une «Cour constitutionnelle» qui aura à traiter «les litiges opposant les pouvoirs». Ceci, en plus de la révision de la loi électorale dans l’objectif d’«écarter l’argent sale et les corrompus de la politique» et «l’introduction de mesures de contrôle qui permettront d’accéder aux postes par la voie des urnes». Ainsi, pour Abdelmadjid Tebboune, «il y a de cela une année, les citoyens et citoyennes sont sortis dans un hirak béni et pacifique, sous la protection de l’Armée nationale populaire (ANP), digne héritière de l’Armée de libération nationale (ALN), pour revendiquer le changement». Et c’est, ajoute-t-il, «pour ne pas retomber dans la tragédie vécue lors des années 1990», qu’il y a eu cet «élan du peuple algérien pour une élection transparente et régulière».

Une année pour régler des problèmes locaux

Dans le cadre de l’objet de la conférence, le président de la République a été intransigeant à l’endroit des walis et autres responsables locaux quant au respect des délais et des plans de charge, notamment en matière de contrôle de la qualité des travaux, pour ce qui est également des projets sociaux et économiques liés au développement local. A cet effet, il a programmé sur place la diffusion d’un reportage réalisé par le service communication de la Présidence, en collaboration avec l’EPTV, qui montre les différents problèmes que rencontrent bon nombre de citoyens dans les villages et parfois même à la périphérie des grandes villes, tels que l’absence d’eau potable, d’assainissement, d’électricité, de routes ou de transport et de cantines scolaires. «Dans trois ou quatre mois, les résultats doivent être visibles. Et dans une année, on fera le bilan. Ces problèmes doivent être réglés», a-t-il déclaré sur un ton rigoureux.

Pour y remédier, le chef de l’Etat, et tout en annonçant l’affectation, en avril et mai prochains, d’une enveloppe financière supplémentaire de 100 milliards de dinars au profit des communes, en plus des 80 milliards débloqués en décembre dernier dans le cadre de la Caisse de solidarité et de garantie des collectivités locales, a cité un nombre de fléaux qu’il faudrait combattre, en premier lieu celui de la corruption. «Nous devons poursuivre rigoureusement la lutte contre la corruption et l’abus de fonction», a-t-il déclaré, en mettant l’accent notamment sur la «petite corruption» qui empoisonne la vie du citoyen. Il citera, à cet effet, à titre d’exemple, les agents de l’administration qui réclament de l’argent pour faire délivrer un document à un citoyen.

Tebboune a également évoqué le dossier du logement dans la capitale où 16 800 certificats de résidence avaient été falsifiés. Et ceux-ci étaient cédés contre 1500 DA, a-t-il indiqué. Le chef de l’Etat a, dans le même registre, lancé des messages sévères envers les agents de l’administration ou les responsables qui s’adonneront au trafic d’influence ou à l’abus de fonction, comme ceux responsables de la distribution complaisante de logements ou la passation douteuse de marchés publics. «Attention !, attention !, attention !», a-t-il répété. Il a aussi parlé du gaspillage des deniers de l’Etat, y compris celui relatif aux visites de travail et d’inspection organisées avec faste.

Le pays va vers la décentralisation

Pour Abdelmadjid Tebboune, «l’actuel mode de gouvernance a montré ses limites». D’autant qu’il n’est pas possible de gérer un pays de 42 millions d’habitants comme ça se faisait avec quelques millions seulement. Et parmi les solutions préconisées : l’octroi de plus de moyens aux autorités locales. «On va vers la décentralisation», a lancé le chef de l’Etat. A cet effet, la fiscalité locale sera revue.

Comme, bien évidemment, beaucoup d’autres textes de loi. Le Président promet, ainsi, de revoir tout le système politique et mode de gestion économique du pays. Sur place, il a demandé à ses ministres d’accélérer la mise sur pied de leurs feuilles de route respectives.

Si certains se demandent d’où Tebboune va ramener l’argent pour mettre en application ses promesses, notamment celles relatives à l’économie, le chef de l’Etat donne l’impression d’être confiant. Il a révélé à l’occasion le chiffre qui concerne les dettes de «certains investisseurs» contractées auprès des banques, à janvier dernier, et qui ne sont pas encore recouvertes. Il s’agit d’une somme de 1216 milliards de dinars (près de 12 milliards de dollars). D’autres aspects du secteur économique ont également été évoqués.

Le Président a mis l’accent à ce propos sur les «lobbys d’importation qui tuent la production nationale». Dans le secteur agricole par exemple, notamment les produits destinés à la transformation, il n’est plus question d’importer, sauf si nécessaire. La problématique du montage dans l’industrie, le CKD-SKD, sera également prise en charge. Il a indiqué que pour l’instant, la situation a été débloquée, des postes d’emploi étant en jeu, mais des comptes seront demandés à ces industriels d’ici peu de temps. «On est en train d’importer du sable dans un pays où les trois quarts de son territoire sont du sable», a-t-il lancé devant l’assistance.

En somme, le chef de l’Etat a donné, hier, un aperçu de ce qu’il compte faire pour booster l’économie, encourager le développement local et surtout démocratiser le pays. Reste maintenant à traduire tout cela sur le terrain.  


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