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Benzekri «En 1992, certains ne voulaient pas que la JSK gagne la coupe»



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«Jouer la finale à Zabana nous avait choqué car elle avait été programmée au 5-Juillet»

Dans un premier temps, parlez-nous de votre expérience avec la JSK avec laquelle vous avez remporté la coupe d’Algérie…
C’est vrai que j’ai entraîné la JSK en 1991. A cette époque-là, j’étais jeune et c’est clair que ce titre reste très particulier pour moi. Cette coupe d’Algérie reste dans ma mémoire car c’est le défunt Mohamed Boudiaf qui nous avait remis le trophée. C’était la première fois qu’il remettait une coupe. Et pour ce qui est du challenge sportif, ce titre m’a marqué car nous avons mis en place un groupe très jeune et c’est d’ailleurs à partir de là que la JSK s’est complètement relancée en championnat.
Comment s’est effectuée votre venue à la JSK ?
J’avais 38 ans lorsque le président de la JSK Moh Cherif Hannachi avait pris attache avec moi. Il m’a proposé de prendre en main l’équipe. Il est clair que lorsqu’un grand club comme la JSK vous sollicite, on ne peut pas dire non. De plus, j’étais de la région, ce qui a facilité ma venue. J’ai donc accepté ce challenge et ç’a été une grande expérience.
Vous avez été à l’origine de l’arrivée de plusieurs joueurs du RCK, à l’image de Azeb, Boudina, Belmellat et Benhamlat. Certains vous avaient critiqué à l’époque en disant même que la JSK allait devenir la JS Kouba…
Il faut savoir avant toute chose que les joueurs que vous avez cités sont originaires de la région de Kabylie. Ce sont tous des jeunes joueurs qui ont par la suite brillé avec la JSK. Belmellat est devenu international, idem pour Benhamlet qui a été sélectionné à l’âge de 17 ans. C’est dire que notre choix a été judicieux. Ce ne sont pas les seuls puisque Doudane, Benkaci et Amaouche ont, eux aussi, brillé à la JSK. J’ai toujours privilégié les joueurs de la région car c’est le cachet de la JSK.
Êtes-vous de ceux qui pensent que les joueurs de la JSK doivent être issus de la région de Kabylie ?
Oui. J’ai toujours cette idée. Ce n’est pas du régionalisme, mais c’est le cachet de ce grand club. D’ailleurs, ce n’est pas propre uniquement à la JSK. Il y a l’exemple de l’Athletic Bilbao où l’ensemble des joueurs sont des Basques.
Comment était votre relation avec les supporters ?
La relation était des plus normale. Les supporters de la JSK savent faire la différence entre un entraîneur sérieux et un autre qui prend son travail à la légère. J’ai toujours donné le meilleur. Il y avait très peu de moyens contrairement à aujourd’hui. Je remercie d’ailleurs les supporters de la JSK qui nous ont toujours soutenus.
Revenons un peu en arrière, en particulier l’année où vous avez remporté la coupe d’Algérie. Commençons d’abord par cette victoire face au grand MCO…
Nous nous sommes imposés sur le score de 2 buts à 1. Il y avait effectivement la grande équipe avec de grands joueurs à l’image de Tasfaout, Benmimoun et les autres. A cette époque, j’avais une jeune équipe. Seuls Amara et Haffaf étaient les plus anciens de l’effectif. Ils ont d’ailleurs apporté un grand plus aux jeunes joueurs de l’époque.
Vous avez par la suite battu le NAHD, un match sans doute spécial pour vous…
Je suis un entraîneur professionnel et même si le NAHD est ma maison, je me suis battu pour que la JSK s’impose au final. Je suis aussi de la région de Kabylie et il fallait faire son travail convenablement. En tous les cas, dans le monde professionnel, il n’y a pas de sentiment. Même avec les supporters du NAHD ou de l’USMA ou de l’ensemble des clubs où j’ai travaillé, il y a toujours eu une relation de respect entre nous. Il est vrai qu’à l’époque, j’avais éliminé le NAHD en coupe d’Algérie, mais ils savaient que j’étais professionnel.
Parlons maintenant de cette grande finale de 1992. Comment avez-vous d’abord appris ce changement de domiciliation à la dernière minute ?
Il est vrai que le match allait se dérouler au stade du 5-Juillet avant que cette finale ne soit délocalisée au stade Zabana. Au moment où nous avions appris la nouvelle, nous étions en stage à Sidi Fredj. Je ne vous cache pas que ç’a été un choc pour nous tous. Personnellement, je n’ai pas pu comprendre cette décision. Je suis un sportif et les décisions politiques m’ont toujours dépassé.
Comment avez-vous géré les joueurs ?
J’ai demandé aux joueurs de rester concentrés sur ce match et travailler dans le but de tenter de remporter cette coupe d’Algérie. Nous sommes des sportifs et on n’avait pas à expliquer cette décision politique. Comme vous le savez, c’est la Présidence de la République qui organise ces événements. Alors, nous étions dans l’obligation de nous adapter à cette nouvelle programmation. Par contre, il y avait un problème avec les supporters de la JSK qui ne voulaient pas se déplacer à Oran.
Ils avaient exigé le boycott, n’est-ce pas ?
Oui. Ils nous ont demandé de ne pas faire le déplacement à Oran. En cette période, le président Hannachi s’était éclipsé face à la grande colère de la rue. Personnellement, je dois dire qu’il avait une énorme pression sur les épaules. Même nous en tant que staff. D’ailleurs, dès qu’on terminait l’entraînement, on rentrait chez nous pour fuir les supporters qui voulaient connaitre la décision de la direction. Il y avait Baris comme président de section, qui pouvait donner une réponse, mais c’était une énorme responsabilité.
Qui a fini par prendre la décision d’aller à Oran ?
C’était moi. J’ai fais savoir à la direction du club que nous allions faire le déplacement à Oran pour jouer cette finale. Je me souviens que Maâmar Djebbour m’avait appelé la veille pour connaitre notre décision. Je lui ai dit que la JSK jouera bel et bien cette finale. C’est à ce moment-là que nous nous sommes déplacés à bord de l’avion militaire à partir de Boufarik. On a eu par la suite quelques soucis de réservation à notre arrivée à Oran, où nous avions passé la nuit dans une caserne. C’est pour cette raison que je dis que la préparation a été très compliquée.
Avez-vous senti qu’il y avait des parties qui ne voulaient pas de la consécration de la JSK ?
Oui. Je le ressens jusqu’à aujourd’hui. Nos supporters ont été maltraités. On nous a mis sous pression avant et pendant le match. Personnellement, je ne pensais vraiment pas qu’on allait gagner cette coupe. Mais la détermination des joueurs a fait la différence.
Ce jour-là, le Président Boudiaf n’était pas venu avant le coup d’envoi…
Oui, c’est ce qui a d’ailleurs soulevé de nombreuses interrogations. Je me disais que le Président devait venir avant le coup d’envoi puisqu’il n’y avait que la ministre des Sports qui était présente pour nous saluer avant le match. Ce n’est qu’en seconde période qu’il est arrivé au stade. En tous les cas, je dis que j’avais beaucoup de respect pour Boudiaf. C’était un grand homme. Et même si j’étais en colère après tout ce que nous avions vécu, j’ai tout de même accepté de monter le voir pour le saluer. Chose que je n’avais pas fait en 1987 lorsque j’ai refusé d’aller saluer Chadli. J’avais 31 ans à l’époque et j’avais refusé de monter pour prendre ma médaille lors de cette finale Bordj Menaiel face à El Harrach.
Est-ce une erreur de votre part ?
Oui, c’est clair. J’ai fait beaucoup d’erreurs de jeunesse. J’ai commencé ma carrière d’entraîneur très jeune à l’âge de 27 ans. De plus, je n’ai pas travaillé avec des entraîneurs. Je me suis forgé moi-même. C’est pour cette raison que j’ai fait des erreurs de jeunesse que je n’ai plus reproduis par la suite.
Mais malgré la difficulté, la JSK a gagné cette coupe…
C’est vrai. Ç’a été un match difficile où nous avions joué pendant un bon moment en infériorité. Il y a eu le but par la suite de Amaouche qui nous a libérés. Ça reste à mes yeux une finale très spéciale qui s’est jouée dans des conditions extrêmes.

 

Dans la 2e partie Benzekri revient sur d’autres sujets aussi intéressants :

Son départ de la JSK
Comment Adghigh a passé 20 ans sans lui parler
Sa relation avec Matoub
Sa réponse à Khalef
Le 7-0 face à l’ASEC Mimosa
 Son passage au MCA

 


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