Sale temps pour les revenus moyens



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En 2018, le SNMG ne représentait que 45% du PIB par habitant, contre 50% en 2012 et 69% en 1995. Le salaire moyen dans le secteur économique n’a été augmenté que de 30% entre 2012 et 2018. Aujourd’hui, la masse salariale totale ne représente que 27% du PIB, contre 34% en 1993.

Les mesures prises pour améliorer le pouvoir d’achat des petites et moyennes bourses, à savoir l’augmentation du SNMG et la suppression de l’IRG pour les salaires, risquent d’être aussi efficaces qu’un cautère sur une jambe en bois en raison de la hausse des prix du carburant contenue dans le projet de loi de finances complémentaire ainsi que de la détérioration du pouvoir d’achat (et de la dévalorisation du dinar) depuis plusieurs années déjà.

C’est que, et comme l’explique le syndicaliste et expert des questions sociales Nouredine Bouderba, le SNMG n’a pas été augmenté depuis le 1er janvier 2012, «un record mondial», dit-il.

«En 2018, précise Nouredine Bouderba, le SNMG ne représentait que 45% du PIB par habitant mensuel contre 50% en 2012 et 69% en 1995.» Le salaire moyen dans le secteur économique n’a été augmenté que de 30% entre 2012 et 2018. Aujourd’hui, la masse salariale totale ne représente que 27% du PIB, contre 34% en 1993.

Par ailleurs, le montant mensuel des allocations familiales par enfant, qui représentait 15% du SNMG en 1995, n’en représente que 1,7% en 2020, parce que toujours indexé sur le SNMG de 1994. Si les salaires et les allocations empruntent les escaliers, ce n’est pas le cas des prix qui prennent l’ascenseur.

Parmi les conséquences de la dévalorisation du dinar (qui a perdu 50% de sa valeur), selon Bouderba : se soigner ou voyager coûte deux fois plus cher à l’Algérien qui doit par ailleurs payer un kilo de viande, 250 g de beurre ou bien une chaussure bas de gamme, au moins 50% plus cher.

Pour lui, le niveau de vie des Algériens est confiné à la «quasi-pauvreté» : «Depuis 2011, dit-il, la contribution des salariés au Budget de l’Etat à travers l’IRG sur les salaires, phénomène unique au monde, dépasse celles des entreprises (impôt sur les bénéfices des sociétés) et des fonctions libérales (IRG des non-salariés) réunies (une fois et demie en 2018).

En 2018, l’IRG sur les salaires représentait 26% de la fiscalité ordinaire, contre seulement 15 % pour l’IBS et 3,5% pour l’IRG des non-salariés.»

S’appuyant sur les chiffres pour établir ses analyses, l’économiste et statisticien Nacereddine Hamouda explique que l’impact de l’augmentation du Snmg sur le pouvoir d’achat par un raisonnement mathématique, sachant que l’actuel SNMG a été fixé par le décret 11-407 du 29 novembre 2011 à 18 000 DA, et a été appliqué à partir du 1er janvier 2012.

«Il est utile de comparer l’évolution de l’indice des prix à la consommation aux deux dates, dit-il. En janvier 2012, ce dernier s’établissait à 148,71 à Alger et 157,2 au niveau national (IPC n°194 ONS).

Le dernier IPC publié est celui du mois de mars 2020 (IPC n°292 ONS) : 209,01 pour Alger et 222,4 au niveau national.

Bien que ces chiffres soient indicateurs de la situation qui prévaut actuelle, leur précision est remise en cause par le statisticien.

«Nous avons signalé à maintes reprises les limites de cet indice, en particulier son obsolescence puisque la note méthodologique qui l’accompagne nous indique que la pondération est celle de l’année 2000 et que les variétés et les points de vente ont été fixés en 2001 !» fustige le statisticien-économiste.

«Les Algériens vivent dans une quasi-pauvreté»

Il reste que les indicateurs abondent généralement dans le même sens. M. Bouderba souligne qu’en 2011, les salaires, selon l’ONS, étaient inférieurs à 1,6 fois le SNMG pour la moitié des salariés et à 40 000 DA pour 80% au moment où les pensions et allocations de 60% des retraités étaient inférieures à 15 000 DA, alors qu’à la même année, le revenu minimal de subsistance d’une famille de 4 personnes était de 40 000 DA, selon différentes enquêtes.

«C’est pour cela que l’enquête sur la consommation des ménages de l’ONS a mis en évidence qu’en 2011, quatre Algériens sur cinq consacraient plus de 60% de leurs dépenses monétaires de consommation à l’alimentation.

Ce coefficient alimentaire, qui ne dépasse pas 12 à 15% dans les pays développés, nous renseigne sur le niveau de quasi-pauvreté de la majorité des Algériens.»

Le statisticien Nacereddine Hamouda  est, lui, dubitatif sur la teneur des chiffres. «La dernière publication sur les salaires (ONS, collections statistiques n°874) concerne ceux de mai 2018 et uniquement le secteur économique hors agriculture et administration. Pour le secteur privé, seules les entreprises de 20 salariés et plus sont enquêtées», glisse-t-il.

Néanmoins, il est difficile, pour les experts de la question salariale, de se réjouir des décisions d’augmenter le SNMG et de supprimer l’IRG pour les salaires de moins de 30 000 DA tant elles sont insuffisantes.

«J’avais, dit Bouderba, dans une première réaction, salué l’augmentation du SNMG et la suppression de l’IRG pour les revenus inférieurs à 30 000 DA comme des mesures, insuffisantes certes, mais positives.

Cependant à la lecture du projet de loi de finances complémentaire 2020 force est de constater que le peu que l’Etat a donné de la main gauche, il en reprend plus de la main droite.

L’augmentation des prix des carburants, dont plus de 20% pour le diesel, va neutraliser tous les effets des mesures citées. Le carburant étant un intrant universel, l’augmentation de son prix va se répercuter sur les prix de transport des produits agricoles et industriels.»

Ce militant syndicaliste s’étonne d’autant plus de ces décisions qu’il y a moins de 45 jours, se rappelle-t-il, le ministre de l’Energie avait promis aux Algériens que les prix des carburants ne seront pas augmentés.

«Le gouvernement prend un risque certain en s’attaquant aux salariés et aux démunis sans lorgner sur ceux qui ont accumulé indûment les richesses et qui ne paient pas leurs impôts.

Le gouvernement est même revenu sur le passage à l’imposition au réel des fonctions libérales décidé par la loi de finances 2020.

Autrement dit, le médecin salarié va continuer à payer plus d’impôt qu’un spécialiste installé et le secrétaire d’un notaire ou d’un avocat plus que son employeur. Le gouvernement est averti des conséquences de ces mesures impopulaires», prévient Nouredine Bouderba.

La solution réside dans une augmentation de 50% du SNMG

Pour Nacereddine Hamouda, la décision de la suppression de l’IRG pour les revenus de moins de 30000 DA paraît tronquée. «En effet, explique-t-il, il faudrait au moins préciser les barèmes d’imposition au-delà de ce seuil et dans quelle mesure il est tenu compte de la structure familiale.

Il est clair que 30 000 DA pour un célibataire ou un salaire unique avec deux enfants devrait être imposé différemment. D’où la nécessité de disposer d’une information détaillée sur la distribution des revenus et non plus se contenter des moyennes qui sont publiées par l’ONS.»

Si l’on en croit les calculs de Nouredine Bouderba, le gain de l’augmentation du SNMG et la suppression de l’IRG pour les bas revenus variera entre 8% et 10% pour les travailleurs dont le salaire est compris entre 35 000 DA et 16 000 DA et de 15% pour les smicards (salaire compris entre 18 000 et 19 000 DA).

Pour les retraités, le gain sera compris entre 0,2% et 6,2% pour les titulaires des pensions inférieures à 40 000 DA et supérieures à 20 000 DA, et sera de l’ordre de 10% pour ceux qui perçoivent une pension minimale (15 000 DA).

Par contre, tous les salariés du pré-emploi dont le salaire est égal ou inférieur à 15 000 DA ou supérieur à 35 000 DA et tous les retraités dont la pension est supérieure à 40 000 DA n’auront aucun gain (0,2% pour une pension de 39 500 DA).

En gros, dit-il, «l’impact des mesures du PLFC-2020 sur le pouvoir d’achat des salariés et des retraités sera très limité pour ceux qui vont en bénéficier et nul pour une bonne partie des salariés et retraités (négatif si on tient compte de l’augmentation des prix des carburants)».

Pour ce syndicaliste, la solution résiderait dans une augmentation d’au moins 50% du SNMG et une suppression de l’IRG pour tout revenu égal ou inférieur à 1,5 fois le SNMG avec relèvement du seuil de son abattement à deux fois le montant du SNMG.

«En même temps, préconise-t-il, il est important de supprimer l’indexation sur le SNMG des salaires des cadres dirigeants des entreprises et des cadres supérieurs de l’Etat, qui a dévoyé le SNMG de sa vocation.»

S’appuyant sur les chiffres pour établir ses analyses, l’économiste et statisticien Nacereddine Hamouda relève qu’en plus des questions de l’IRG et du SNMG, il y a un troisième élément qu’on ne peut ignorer : les cotisations sociales.

«En effet pour l’employeur, souligne-t-il, le coût du travail intègre celles-ci. Il faut savoir qu’elles représentent plus du tiers de la rémunération brute des salariés.

Cette partie de la rémunération est versée directement aux caisses de Sécurité sociale. Pour minimiser ces versements, la tentation est grande dans le secteur privé de déclarer ses salariés au SNMG, qui est le minimum requis.»

S’il est avéré que l’augmentation du SNMG préconisée est loin de couvrir la perte de pouvoir d’achat, M. Hamouda s’interroge : sur quelle base doit-on indexer le SNMG et avec quelle périodicité ? Quelles sont les implications sur les autres revenus salariaux ? S’agit-il d’une translation de 2000 DA pour l’ensemble des salariés ?


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