A la croisée des chemins, l’Otan aurait-elle «perdu le Nord» ?



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Par Mostefa Zeghlache, ancien diplomate    
«Ce qu’on est en train de vivre, c’est la mort cérébrale de l’Otan. Il faut être lucide.»  Tel est le diagnostic sur l’état de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (Otan) établi  par le chef d’Etat français Emmanuel Macron dans une longue interview accordée à l’hebdomadaire britannique  The Economist, le 21 octobre 2019, et publiée le 7 novembre. Constat lucide, comme il l’affirme, ou simple  «coup de gueule» d’un homme frustré par l’attitude de certains alliés parmi les plus importants membres de l’Organisation ? La déclaration a été faite à la veille du sommet qui coïncidait avec le 70e anniversaire de l’Otan, tenu à Londres  les 3 et 4 décembre 2019. 
Pour rappel, l’Otan est une alliance politique et militaire créée le 4 avril 1949 à Washington, au début de la guerre froide. Elle regroupe 29 pays d’Europe et d’Amérique dont 21 sont membres de l’Union européenne. Parmi les 8 autres figurent les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la Turquie et le Canada. L’ancien Premier ministre norvégien Jens Stoltenberg en est le secrétaire général depuis 2014. Le siège de l'Otan, situé à l’origine à Londres puis à Paris, se trouve depuis 1966 à Bruxelles. Initialement installé en France, le commandement militaire ou «Shape» se trouve aujourd'hui également en Belgique.
La mission initialement dévolue à l’Organisation était de contribuer à contenir la «menace» soviétique et de ses alliés qui, eux, avaient créé leur propre organisation similaire, le Pacte de Varsovie, en mai 1955. Après la chute du mur de Berlin et l’effondrement du bloc communiste d’Europe en 1991, l’Otan a été maintenue et tente, depuis, de s’adapter aux nouvelles missions définies par  ses membres, notamment les USA, selon la conjoncture politique internationale.
Il faut rappeler que durant la guerre froide, période faite de tensions entre les deux blocs, l’Otan n’a été impliquée militairement dans aucun conflit. Elle tenait le rôle de «force collective de dissuasion» de l’Occident. Par contre, elle s’est discrètement dévolue à une autre mission secrète sous l’égide de la CIA et du M16 britannique. Il s’agit de la constitution d’armées secrètes européennes «Stay behind» structurées auprès du Quartier général du commandement allié Opération de l’Otan ou «Shape» et destinées à agir dans l’ombre dans le cas d’une invasion soviétique de l’Europe. 
Depuis la fin de la guerre froide, de nouvelles perspectives se sont donc ouvertes pour l’Otan qui, en contradiction avec ses statuts limitant son aire d’action aux territoires de ses membres, se déploie tant en Europe que dans des régions lointaines comme l’Afghanistan ou l’Irak. L’Amiral d’escadre Luigi Lillo, commandant des forces navales alliées de l’Europe du Sud Comnavsouth, explique la nouvelle mission de l’Organisation lors d’un séminaire organisé à Alger en 2003 dans une intervention intitulée : «Le dialogue méditerranéen de l’Otan : quelles perspectives pour l’Algérie ?» Pour lui, «il ne s’agit plus de s’opposer à un adversaire bien identifié ou de combattre une menace bien définie, mais, au contraire, de faire face à des risques nouveaux, multidirectionnels et transnationaux qui concernent tous les pays de l’Europe et de la Méditerranée et qui découlent de différentes causes parfois difficiles à prévoir et à prévenir, mais de toute façon déstabilisantes…».
En effet, dès août 1995, l’Otan lance sa première action militaire dans les Balkans intitulée «Deliberate Force» dans le cadre de l’opération de bombardement aérien contre les forces serbes en Bosnie Herzégovine qui dura jusqu’au 20 septembre et aboutit à la signature de l’accord de paix de Dayton, en décembre 1995. 
En 1999, l’Organisation est intervenue au Kosovo sur la base de la résolution 1244 du 10 juin 1999 du Conseil de sécurité, et s’est maintenue dans ce pays après la proclamation de son indépendance, le 17 février 2008, en dirigeant la force multinationale (Kfor).
Immédiatement après les attentats du 11 septembre, les Nations unies créent la Force internationale d’assistance à la sécurité en Afghanistan (Fias) et en confient la direction à l’Otan en août 2003. La Fias a été remplacée le 1er janvier 2015 par la mission de formation et conseil «Resolute Support». 
S’agissant de l’Irak, le sommet d’Istanbul en 2004 a décidé de la création de la mission Otan de formation en Irak chargée, encore à ce jour, de la formation des forces régulières irakiennes. De même, l’Otan a rejoint, en mai 2017, la coalition internationale en Irak, menée par les Etats-Unis contre l’organisation  Etat islamique en Irak et au Levant - Daech.
L’Afrique n’est pas oubliée dans la stratégie de déploiement de l’Otan, puisque, dès 2007, l’Organisation a apporté son soutien logistique aux forces internationales déployées au Darfour (MUA devenue Minuad 7 800 Casques bleus). De 2009 à 2016, ses forces navales avaient été déployées (Ocean Shield) au large de la Somalie pour lutter, avec d’autres pays notamment de l’UE (opération Atlante), contre la piraterie et apporte son soutien logistique à la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISom). 
Mais c’est en Libye que l’OTAN a révélé au grand jour sa nature d’«instrument de destruction massive» au service de l’Occident avec la bénédiction du Conseil de sécurité de l’ONU (résolution 1973 du 17 mars 2011). Outre son aspect illégal suite au dépassement du mandat onusien destiné à mettre en place une zone d’exclusion aérienne pour «protéger les civils », l’intervention de l’Otan à travers l’opération «Unified Protector» a eu lieu moins d’un an après l’adoption, par le sommet de Lisbonne, d’un nouveau concept stratégique reconnaissant à l’Organisation un rôle inédit dans le contexte de la problématique de la sécurité énergétique de l’Occident. Le sommet établit notamment que l’Otan entend «développer sa capacité à contribuer à la sécurité énergétique, y compris par la protection des infrastructures énergétiques et des zones et voies de transit critiques». Le décor est planté pour l’intervention contre la Libye «pétrolière» avec les conséquences que l’on connaît encore à ce jour.
A travers ses interventions hors de l’aire géographique des pays membres, l’Otan est devenue, depuis 1995 et la disparition de la menace soviétique, un vecteur de propagande des «vertus occidentales» et de défense des intérêts de l’Occident comme le révèle la déclaration de Bruxelles du 11 juillet 2018 : «l’Otan garantit la sécurité de notre territoire et de nos populations, notre liberté et les valeurs que nous partageons, parmi lesquelles la démocratie, la liberté individuelle, les droits de l’Homme et l’Etat de Droit. Notre Alliance incarne le lien transatlantique immuable qui unit l’Europe et l’Amérique du Nord pour que celles-ci fassent front ensemble contre les menaces et les défis d’où qu’ils viennent.» 
C’est le sommet de Prague en 2002 qui a décidé la mise au service de l’UE des moyens de l’Otan. En décembre de la même année, les deux entités signent une déclaration sur la politique européenne de sécurité et de défense commune qui fixe le cadre de la coopération politique et militaire bilatérale. Une cellule est créée au niveau de l’état-major de l’Otan pour assister l’Union dans ses opérations militaires menées avec les moyens de l’Organisation.                            
Viennent ensuite les accords de «Berlin Plus» en mars 2003 qui renforcent le cadre de cette coopération par le biais d’un «partenariat stratégique pour la gestion des crises». Et c’est ainsi que l’UE lance, la même année, sa première opération «Concordia» en Macédoine avec les moyens de l’Otan. Et en décembre 2004, l’UE hérite, via l’opération «Althéa», du commandement de la «Stabilization Force» de l’OTAN pour le maintien de la paix en Bosnie-Herzégovine. ∂En décembre 2017, les deux parties décident d’étendre la coopération à la cyberdéfense et en juillet 2018, une nouvelle déclaration renforce la coopération sécuritaire, notamment la lutte antiterroriste. 
L’espace maritime est un autre secteur sensible pour l’Occident. Dans le cadre de l’opération «Active Endeavour» initiée au lendemain du 11 septembre, les navires de l’Otan patrouillent en mer Méditerranée pour «décourager et déjouer» les actes terroristes. En 2016, elle a été remplacée par l’opération «Sea Guardian» avec pour mission notamment «la détection et la dissuasion des activités terroristes en Méditerranée» et l’escorte de navires civils et militaires des pays alliés.
Enfin, l’Otan intervient dans la gestion des crises migratoires en coopération avec l’agence européenne «Frontex» remplacée en octobre 2016 par l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes. La mission réelle de l’Otan est de contribuer à endiguer le flux migratoire vers l’Europe.
Le sommet de Bruxelles tenu en juillet 2018 a adopté une déclaration qui reprend les «principes» et  concepts »politiques sur lesquels se base la mission de l’Organisation s’agissant notamment de «dissuasion et de défense» dont le dispositif repose sur «une combinaison appropriée de capacités nucléaires, conventionnelles et de défense antimissile». 
Le Sommet de Londres en décembre 2019 a déclaré l’espace «zone d’opération» de l’Otan. Ce sommet de 2019 est non seulement le plus récent et s’est tenu dans le contexte de la commémoration du 70e anniversaire de l’Organisation, mais c’est surtout celui qui a été précédé et émaillé de graves dissensions entre certains de ses membres que le Secrétaire général a tenté de relativiser en soulignant que «la force de l’Otan est que nous avons toujours été capables de surmonter les différences».
C’est, sans conteste, la déclaration du président français établissant la «mort cérébrale» de l’Organisation qui a mis «le feu aux poudres». Il a justifié son «verdict» par un constat portant sur l’attitude américaine et turque en Syrie. Macron reproche aux Etats-Unis et à la Turquie leur politique en Syrie menée sans consultation des partenaires de l’Otan dont la France. 
Il a déclaré à cet effet : «Vous avez des partenaires qui sont ensemble dans une même région du globe et vous n’avez aucune coordination stratégique des Etats-Unis avec les alliés en Syrie. Nous assistons à une agression menée par un autre partenaire stratégique de l’Otan qui est la Turquie, dans une zone où nos intérêts sont en jeu, sans coordination.»  
Il s’interroge donc sur l’utilité de l’article 5 des statuts de l’Organisation stipulant que l’agression contre un membre est considérée comme une agression contre l’ensemble des autres membres. Les réactions souvent vives n’ont pas tardé.
Lors d’une conférence de presse avec le SG de l’Otan, le président américain D. Trump a qualifié le jugement de Macron de «très insultant et très méchant à l’égard des 28 pays». Pour sa part, la chancelière allemande le considère «intempestif» ajoutant que «même si nous avons des problèmes…, l’Otan reste vitale pour notre sécurité». Tandis que le ministre britannique des Affaires étrangères appelait les alliés à tenir leur engagement de consacrer 2% de leur PIB au budget de l’Organisation qui est «le moyen le plus sûr de renforcer la relation transatlantique». Si Macron se sent en mesure de critiquer ses alliés américain et turc, conscient qu’il est du statut de la France d’unique membre du Conseil de sécurité de l’ONU et d’unique puissance nucléaire de l’UE, depuis le Brexit, cette puissance ne semble pas inciter ses partenaires européens surtout baltes, d’Europe de l’Est et l’Allemagne à penser un jour changer le parapluie nucléaire américain contre un autre français. D’ailleurs, A. Merkel s’est non seulement montrée critique à l’égard de son allié et voisin français, mais a tenu à rassurer Trump en déclarant : «Nous nous étions engagés à augmenter nos dépenses de défense jusqu’à atteindre 2% du PIB. Cet objectif sera atteint au début 2030. Nous nous y sommes engagés et nous nous y tiendrons !» 
Mais l’exaspération du président français de l’attitude américano-turque en Syrie n’a été que l’étape ultime d’une somme de frustrations enregistrées depuis l’élection de Donald Trump.
Il faut reconnaître que l’opposition de Trump au multilatéralisme ne concerne pas que les sphères économique, environnementale et culturelle, mais s’étend à une alliance militaire stratégique pour l’Occident dont les Etats-Unis ont été les initiateurs et dont ils ont le commandement ! Il en est de même pour l’OSCE. Par ailleurs, Washington a quitté l’Unesco en décembre 2017 et le Conseil des droits de l’homme  le 19 juin 2018, quoique que son mandat courait jusqu’en 2019. Récemment, en mai 2020, c’est au tour de l’OMS de faire les frais du courroux de Trump dans le contexte de la pandémie du coronavirus où Washington détient le triste record du pays le plus infecté du globe. La raison invoquée pour ce dernier retrait concerne évidemment la Chine accusée par Trump d’être responsable de la propagation du virus Corona à travers le monde. Une autre tension qui s’ajoute  à la panoplie de reproches, de menaces et de mesures de rétorsion contre la Chine.
Il faut rappeler que les critiques de Trump contre l’Otan ne sont pas récentes. Elles remontent à sa campagne électorale. Il avait déclaré lors d’un meeting politique, le 2 avril 2016, dans le Wisconsin, au sujet de ses alliés : «Nous les protégeons, nous leur apportons une protection militaire et bien d’autres choses encore et ils arnaquent les Etats-Unis.»  Ces propos inédits ont désarçonné plus d’un parmi ses alliés. En fait, la vision de Trump de l’Otan est conforme à celle qui prévaut au sein du courant républicain et de son électorat pour qui «l’Otan est plutôt une bride imposée à la puissance américaine par des coalitions d’Etats nettement plus faibles et beaucoup moins responsables stratégiquement» et qui «sont nombreux à voir dans l’Alliance une entrave à la liberté d’action des États-Unis dans le monde».
En homme d’affaires convaincu, le président américain ne s’embarrasse pas de préjugés pour rappeler à ses alliés leur engagement pris lors du sommet de Newport en 2014 de consacrer au moins 2% de leur PIB au budget de la Défense dont 20% à l’investissement en équipements. Ce qu’il fit avec beaucoup de «rudesse» lors du sommet de Bruxelles, en juillet 2018. En réalité, les statistiques révèlent que le budget de Défense américain en 2018 était de 672 milliards US$, soit plus que deux fois supérieur aux 300 milliards que les pays européens et le Canada consacrent à leur défense. 
En fait et contrairement à ce qu’avance Trump, les Etats-Unis ne «se ruinent» pas pour leurs alliés avec seulement 30 milliards consacrés à la défense de l’Europe.
Les dividendes politiques qu’ils engrangent sont plus importants. Par contre Trump a raison de rappeler que son pays est le principal contributeur au budget de l’Otan avec plus de 22 % en 2018, suivi par l’Allemagne (14%), la France (10%) et le Royaume-Uni (9,8%).
 Aussi, non content d’humilier ses alliés pour des raisons pécuniaires, il s’en prend à l’Organisation même qu’il considère « obsolète parce que conçue il y a des années et des années» et qu’elle «ne s’est pas occupée du terrorisme». Il ne s’est pas non plus abstenu de critiquer la politique migratoire de la chancelière Merkel. Il estime qu’au lieu d’accueillir des centaines de milliers de réfugiés, l’Allemagne, comme les Etats-Unis, «aurait dû œuvrer pour établir des zones d’exclusion aérienne en Syrie afin de protéger la population. Des zones qui auraient empêché l’escalade du conflit».
D. Trump se comporte en vrai leader de l’Otan et, en cette «qualité», il ne se prive pas de faire des reproches à ses partenaires, notamment au trio France-Allemagne-Grande-Bretagne, de se lier en affaires au projet de gazoduc Nord Stream 2 avec la Russie et avec le géant chinois du téléphone mobile Huawei, deux sujets qui contrecarrent, selon lui, les intérêts stratégiques de l’Amérique. Et c’est justement l’Allemagne, considérée comme la locomotive économique européenne et qui semble vouloir « faire de la souple résistance » au diktat de Washington sur l’Otan et l’Europe, notamment concernant le projet vital pour son économie de Nord Stream 2, qui est devenue l’objet principal de l’offensive de Trump contre certains partenaires européens de  l’Otan. 
En témoigne la dernière décision de Washington de réduire ses effectifs militaires stationnés en Allemagne qui passeront de 35 000 à 25 000 hommes. Les 10 000 hommes retirés seront stationnés en Pologne pour accroître encore plus la tension avec Moscou. Cette décision paraît dure à supporter par Berlin. C’est ce que laisse paraître la chancelière allemande dans un entretien accordé à un certain nombre de médias européens. Dans un style qui frise le dépit, voire l’impuissance, A. Merkel a déclaré : «Nous avons grandi avec la certitude que les Etats-Unis souhaitaient être une puissance mondiale. Si les États-Unis veulent maintenant renoncer à ce rôle de leur plein gré, nous devrons y réfléchir très sérieusement.»  Elle a aussi rappelé avec amertume que «les troupes américaines en Allemagne contribuent à protéger non seulement l'Allemagne et la partie européenne de l'Otan, mais aussi les intérêts américains». Ce n’est sans doute pas l’impact économique et social (emplois) du démantèlement des bases américaines qui constitue la seule préoccupation de Mme Merkel. 
Outre ces critiques et remarques «désobligeantes» de Trump à ses alliés de l’Otan, c’est l’attitude conciliante de Washington à l’égard de l’offensive militaro-diplomatique de la Turquie en Syrie comme en Libye, qui dérange certains membres de l’Otan, plus précisément la France.
En effet, ce sont les décisions turque de lancer le 9 octobre 2019 une vaste offensive (contre les Kurdes) dans la région frontalière avec la Syrie et américaine, du 6 octobre, de retrait des forces US de cette zone, prises sans consultation des alliés, notamment la France, pourtant engagés au sein de la coalition internationale contre Daech, menée par les Etats-Unis, qui ont poussé le président français à exprimer son mécontentement à travers son diagnostic sur l’Otan. En fait, les relations entre Paris et Ankara sont tendues de longue date, au sujet de ce que Paris qualifie de génocide des Arméniens entre 1915-1923 et qu’Ankara récuse. 
En effet, en décembre 2011, l’Assemblée nationale française a voté une loi par laquelle la France, qui reconnaît le génocide arménien depuis 2001, punit la négation de ce génocide, et ce, bien entendu, en dépit de l’opposition farouche des autorités turques. Dans une conférence de presse en décembre 2011, le Premier ministre turc d’alors, T. Erdogan, avait évoqué, «en représailles», le génocide commis par la France coloniale en Algérie. 
De plus, les dirigeants turcs sont irrités par l’attitude de Paris à l’égard de leur ennemi juré, le PKK. Macron avait reçu une délégation des Forces démocratiques syriennes et la milice kurde des YPG qu’Ankara considère comme terroriste et affiliée au PKK poussant ainsi le MAE turc à accuser, en novembre 2018, le président  Macron de soutenir le terrorisme. 
Le feuilleton des crises entre Ankara et Paris semble inscrit dans la durée, même si son expression demeure à ce jour éminemment verbale, à travers l’échange d’accusations et de contre-accusations et la publication de communiqués mettant mal à l’aise l’homogénéité supposée de l’Otan.  
En témoigne le plus récent épisode qui date de juin 2020 et qui a eu pour théâtre la Méditerranée, non loin des côtes libyennes. Une vidéo diffusée le 17 juin par le ministère des Armées francais décrit un incident intervenu le 10 juin en Méditerranée orientale mettant en scène une frégate française, Le Courbet, qui, selon ce ministère, tentait d’identifier un cargo suspecté de transporter des armes vers la Libye, et des frégates turques qui seraient intervenues pour protéger le cargo en «illuminant  Le Courbet à trois reprises avec leur radar de conduite de tir». Une attitude considérée «extrêmement agressive» par les autorités françaises, notamment le président Macron, qui, en marge de la visite du président tunisien Kaïs Saïed, n’a pas mâché ses mots le 22 juin à l’encontre de la Turquie et de l’Otan à nouveau décrite en état de «mort cérébrale». A cette occasion, Macron a déclaré : «Je considère aujourd'hui que la Turquie joue en Libye un jeu dangereux et contrevient à tous ses engagements pris lors de la conférence de Berlin.» Il s’agit notamment du respect de l’embargo sur les armes destinées aux protagonistes libyens et dont Ankara semble faire fi. 
L’incident maritime turco-francais révèle un malaise plus profond qui secoue l’Organisation dont les membres défendent des intérêts géostratégiques et économiques antagoniques, notamment en Libye. Paris reproche à Ankara son engagement, notamment militaire, par les armes et les mercenaires libyens, aux côtés du gouvernement de Tripoli qui gagne progressivement du terrain sur son opposant le maréchal Haftar, alors que la Turquie accuse Paris de tenir le rôle de «sous-traitant» pour des pays de la région, allusion sans doute à l’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, voire l’Egypte. Le tout sur fond de lutte pour des intérêts économiques actuels (pétrole et gaz) et à venir (reconstruction du pays). Le 29 juin, le président francais n’a pas su tempérer sa tenace animosité à l’encontre de la Turquie en déclarant qu’elle avait une «responsabilité historique et criminelle» dans ce conflit, en tant que pays qui «prétend être membre de l'Otan».
Par ailleurs, la France, constatant que son agitation contre la Turquie produisait peu d’effets sur le reste des membres de l’Otan, a décidé le 1er juillet de se retirer de l'opération de sécurité maritime de l'Otan en Méditerranée chargée de veiller sur l’application du blocus sur les armes vers la Libye, pour marquer son mécontentement envers l’Organisation qu’elle considère trop conciliante avec Ankara, qui, selon Paris, viole le blocus sur les armes et envoie des jihadistes syriens en Libye.
Dans la foulée, le journal turc Sabah a publié le 22 juin un article informant qu’un ancien employé du service de sécurité du consulat général de France à Istanbul a révélé à la police turque qu«'il avait collecté des informations pour les services de renseignement extérieurs français (DGSE). Quatre personnes soupçonnées d'avoir espionné des milieux associatifs et religieux pour le compte de la France ont été arrêtées ». Quelle que serait sa véracité, cette information vient ternir davantage l’atmosphère «polluée» qui caractérise les relations entre deux importants membres de l’Otan, sous l’œil gêné des partenaires européens et presque détaché de l’Oncle Sam. En fait, la Turquie s’avère un allié parfois imprévisible pour ses partenaires de l’Otan. En témoigne sa décision d’acquérir des missiles S-400, au grand dam de Washington qui les considère «incompatibles» avec les systèmes (américains ?) de l’Otan et a menacé Ankara d’exclusion du programme d’avions F-35. 
Par ailleurs, l’inauguration, le 8 janvier 2019, du gazoduc TurKStream par Erdogan et Poutine s’identifie bien comme un défi de la Turquie au puissant allié américain. La politique turque en Syrie, le soutien apporté à des organisations armées de la mouvance islamiste extrémiste et aux Frères musulmans que beaucoup de pays occidentaux qualifient de terroristes et l’offensive d’octobre 2019 dans le nord de la Syrie, sans coordination avec l’Otan, font de la Turquie un véritable «casse-tête» pour ses alliés de l’Otan, notamment la France.
Mais ce «turbulent» allié reste tout de même utile, voire nécessaire au moins comme «tête de pont» au niveau du chaudron moyen-oriental, comme le révèle  le SG de l’Organisation en mai 2019 pour qui «la  Turquie doit faire face à de graves défis de sécurité et les alliés se tiennent à ses côtés».
Néanmoins, des voix xénophobes demandent son exclusion de l’Otan. Le chef de file de ce courant n’est autre que le sioniste B.-Henri Lévy, le maître «à penser» de la catastrophe libyenne. Partant de ses élucubrations dans un torchon intitulé «L’Empire et les cinq rois», il rappelle, en août 2018, que l’empire (l’Amérique) est menacé par les 5 rois perse, turc, chinois, russe et arabe, «partis à la reconquête de leur gloire passée» nantis du rêve de reconstituer le califat, la dynastie des Ming et des Qing, l’empire eurasiatique, la dynastie achéménide perse et l’antique empire du Touran (peuples turcophones)» ! Il insiste plus particulièrement sur la Turquie en parlant de «lente dérive du pays de Mustafa Kamel» et conclut que «jadis on s’interrogeait sur l’opportunité de faire rentrer ou non la Turquie en Europe. Ce jour-là, le nouveau problème à poser est de savoir s’il ne devient pas opportun de la faire sortir de l’Otan». Il semble ignorer que la Turquie est liée aux Etats-Unis par un accord de défense qui permet notamment aux Américains de maintenir sur le territoire turc des bombes nucléaires de type 50 B-61stocquées à la base aérienne d’Incirlik.
Pour le président américain, la Turquie est un allié stratégique, certes difficile à manier, mais utile. Les préoccupations de Trump sont ailleurs, auprès de la Russie et de la Chine. 
Auparavant, il y a lieu de rappeler que dès 1991, la Russie avait adhéré au Conseil de coopération nord-atlantique (CCNA) et rejoint, en 1994, le partenariat  pour la paix en appuyant, par des troupes, l’intervention de l’Otan dans les Balkans. Au CCNA a succédé, en 1997, le  Conseil de partenariat euro-atlantique. En 2002, la coopération et le dialogue entre les 2 partenaires se sont renforcés par la création du Conseil Otan/Russie (COR). Mais «suite à l’action disproportionnée  de la Russie en Géorgie» en août 2008, la coopération bilatérale a été suspendue pendant près d’une année. La tension s’est accrue davantage depuis l’intervention russe en Ukraine et l’occupation de la Crimée en février 2014. Depuis avril 2014 toute coopération militaire ou civile entre les deux parties a été suspendue par l’Otan. Un minimum de concertation politique est néanmoins maintenu. 
Le climat est tendu en raison des méfiances de l’Otan (USA) de ce qu’elle qualifie «de manœuvres russes en mers Baltique et Noire, l’arsenal nucléaire russe, la politique russe en Syrie, les cyberactivités russes contre les alliés et les actes d’espionnage». Il se trouve même que les stratèges de l’Otan continuent de monter des scénarii d’une attaque russe contre les membres de l’Otan. «Selon CNN, il s’agissait d’un jeu de guerre impliquant l’utilisation d’armes nucléaires de faible puissance par la Russie contre ‘’un contingent européen’’ et une riposte nucléaire de l’Otan.» Autant de reproches qui ont pris leur envol depuis l’arrivée de Trump et des Républicains au pouvoir à Washington, avec notamment des sanctions de toutes sortes imposées à l’économie russe.
Le président américain dont l’élection n’aurait eu lieu que grâce au «coup de pouce informatique» de Moscou semble résolu à entraîner l’Otan dans son bras de fer avec la Russie. En décembre 2018, les Etats-Unis annoncent leur intention de se retirer du traité sur les Forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) signé en 1987 avec l’ex-URSS, au prétexte que Moscou ne respectait pas ses engagements en produisant, testant et déployant un nouveau missile à charge nucléaire et de portée intermédiaire (SSC-8/9AM7212) «menaçant la sécurité» de pays européens. Depuis le 2 août 2019, le retrait américain est définitif, poussant la Russie à faire autant. Ce fut l’occasion pour l’Otan de publier une déclaration appuyant la décision américaine et faisant endosser à Moscou «l’entière responsabilité» de l’extinction du traité !  
Deux  semaines après le retrait américain, le Pentagone a annoncé le 19 août 2019 avoir testé un missile de croisière Tomawak MK-41 doté d’une ogive conventionnelle. Le test a été qualifié par Moscou de prémédité pour justifier le retrait américain du FNI.
Par ailleurs, c’est avec la même détermination que le président américain a annoncé le 22 mai 2020 la décision de son pays  de se retirer du traité international Open Sky (Ciel ouvert) signé en 1992 (34 pays membres), entré en vigueur en 2002 et destiné à «promouvoir la confiance et la prévisibilité» sur les activités militaires des pays signataires grâce à des vols d’observation non armés au-dessus de leurs territoires». Une fois encore, ses alliés notamment de l’Otan semblent avoir été pris de court et «déstabilisés» par la décision de Trump. Dix pays européens dont l’Allemagne, la France, l’Italie et l’Espagne ont exprimé leurs regrets à ce sujet et se sont engagés à poursuivre sa mise en œuvre avec Moscou, après avoir émis des critiques contre la Russie pour son «manque de respect» de ses engagements s’agissant en particulier de l’interdiction de survol de l’enclave de Kaliningrad. Trump n’a pas exclu la renégociation de cet accord tout comme il l’a annoncé concernant les accords sur le nucléaire iranien de Paris sur le climat ou le traité FNI. 
L’objectif est de permettre à son administration de négocier dans un cadre bilatéral où les USA se sentent plus forts et dans la perspective d’inclure, une fois encore, la Chine avec son potentiel économique et militaire. Plus récemment encore, l'Otan a annoncé le 30 juin 2020 l’adoption d’un nouveau plan de défense pour les pays baltes et la Pologne, et dont le contenu reste secret. Selon des responsables lituaniens, ce plan vise à renforcer la défense antiaérienne et le déploiement rapide des forces de l'Otan en cas de crise, sous-entendu avec Moscou qui a annexé en 2014 la péninsule ukrainienne de Crimée.
L’actuelle Administration américaine n’est pas obnubilée uniquement par l’aspect militaire et technologique de sa relation avec Moscou. Le soubassement de l’agitation de Trump contre Moscou est fondamentalement économique. Il se lit aisément dans les différentes sanctions et autres mesures de rétorsion économique et financière de Washington contre Moscou et sa volonté de faire «plier» la puissance militaire russe par tous les moyens. C’est le cas du projet de gazoduc Nord Stream 2 vital pour l’Allemagne et d’autres pays européens et que Washington veut faire capoter à tout prix.
La politique unilatéraliste de Trump à l’égard de Moscou divise ses alliés de l’Otan. Certains comme la France et la Hongrie souhaitent le maintien du dialogue avec Moscou pour l’emmener à reconsidérer son attitude de «défiance» à l’égard de l’Occident et l’associer à une nouvelle architecture de sécurité en Europe. 
D’autres pays européens  de l’ex-camp socialiste rappellent le cas ukrainien et maintiennent leur méfiance envers l’ex-chef de file de l’ex-URSS.
Cependant, les observateurs avisés estiment que la décision américaine ne visait pas seulement la Russie, mais également, voire davantage, la Chine que Trump souhaite impliquer dans tout traité du genre, à l’avenir, pour tenter de mieux juguler son expansion dans le domaine militaire.
A l’occasion du lancement du missile Tomawak MK-41, le secrétaire d’Etat US a été on ne peut plus clair en déclarant : «Nous voulons nous assurer que nous avons les capacités de dissuader la Chine de tout comportement néfaste en disposant de nos propres moyens pour pouvoir frapper des cibles à portée intermédiaire.»  Ces propos ont fait réagir le porte-parole du MAE chinois pour qui «l’essai américain montre que les Etats-Unis sont bien engagés dans une nouvelle course aux armements et une nouvelle confrontation lourde de menaces pour la sécurité régionale et internationale». A la satisfaction de Trump, l’Otan, en la personne de son secrétaire général, applaudit et justifie la politique américaine à l’encontre de Pékin comme de Moscou. Aussi, la déclaration du sommet de Londres considère «la montée en puissance de la Chine comme un défi» et Stoltenberg s’empresse pour déclarer : «la Chine dispose du deuxième budget de Défense du monde et s’est dotée d’un grand nombre de nouvelles capacités modernes, y compris des missiles à longue portée capables d’atteindre l’ensemble de l’Europe et les Etats-Unis.» Trump n’espérait pas mieux. 
Depuis la chute du mur de Berlin et jusqu’à la présidence de Donald Trump, l’Otan a été et demeure un instrument de domination au service de la vision américaine unipolaire du monde. Néanmoins, Trump estime que dans l’état actuel de ses «services», l’Otan ne correspond pas tout à fait à sa conception d’une telle organisation militaire, et ce, au point où il considère utile qu’elle intègre de nouveaux membres comme le Brésil de Bolsonaro et les Philippines de Duterte, deux leaders connus pour leur proximité avec l’extrémisme de droite  et le peu de cas qu’ils font des droits de l’Homme dans leurs pays. Il pousse l’ambiguïté jusqu’à proposer à l’Organisation de s’ouvrir à des pays du Moyen-Orient en inventant la Natom ou Nato et Middle East ! Cette dernière proposition intervient, on le sait, au moment où la tension avec Téhéran est à l’extrême et que la présence notamment militaire des Etats-Unis est remise en cause en Irak comme en Syrie. 
A la croisée des chemins, l’Otan ? Pas vraiment aujourd’hui. A la chute de l’URSS, peut-être. Mais pas aujourd’hui car rien ne vient remettre en cause l’hégémonie américaine sur cette organisation. Les velléités françaises d’indépendance européenne en matière de sécurité collective sans le leadership américain n’est pas envisageable pour de nombreux partenaires européens qui ne peuvent se passer du parapluie nucléaire et de la puissance militaire américains. Un site électronique signale que «dans les documents tenant lieu de Livre Blanc de la défense de la Pologne, de la Roumanie et des Etats baltes mais aussi des Pays-Bas, de la Norvège et de l’Allemagne, la participation à l’Alliance atlantique apparaît comme la raison d’être de l’action des forces armées. Agir en coalition avec l’Otan et s’intégrer dans ses structures de commandement est le mode normal de ces Etats en matière militaire».  Tenter de les convaincre du contraire, comme le fait Macron, relève de la mission impossible.
Un autre facteur et non des moindres est l’incapacité dont font preuve les Etats européens, qu’ils soient membres de l’Otan ou pas, à coordonner leurs politiques en matière de relations extérieures et de défense. On l’a relevé dans plusieurs situations, notamment au Moyen-Orient et en Afghanistan où les USA jouent un rôle majeur. L’Otan vient seulement en appoint. Trump en est conscient lui qui est allé jusqu’à saluer le Brexit, un symbole de la division de l’Europe.
Pour leur part, les Etats-Unis ont besoin du marché européen, autre gros consommateur, avec les pays arabes du Moyen- Orient et l’Inde, d’équipements sensibles de l’industrie militaire américaine.
Selon le site spécialisé américain Defence News 2019, 5 des 10 premières entreprises de l’industrie d’armement dans le monde selon leurs revenus en milliards de dollars, en 2018, sont américaines, Lockheed Martin en tête, 3 sont chinoises, 1 britannique et 1 française. L’entreprise russe Almaz-Antei est à la 15e place. Mais s’agissant du commerce international d’armes, avec successivement 22,36 milliards de dollars, 6 milliards et 4,5 milliards, les Etats-Unis, la Russie et la France en sont les 3 principaux exportateurs  dans le monde, en 2016. Les budgets de Défense dans le monde s’élevaient  en 2014  à 1 800 milliards de dollars US ! Le poids du lobby militaire dans le monde, d’une façon générale et aux Etats-Unis plus particulièrement lorsque les Républicains sont au pouvoir, n’est plus à démontrer. Le commerce international des armes a beau être réglementé par un traité des Nations unies de décembre 2013 (entré en vigueur en avril 2014), le trafic des armes est un autre monde que seuls certains Etats puissants occidentaux, Israël et les marchands de la mort connaissent. L’Otan reste une destination privilégiée des équipements militaires à laquelle les USA ne veulent pas céder. En témoigne l’épisode des S400 avec la Turquie.
Dans ce contexte de course aux armements et de défis sécuritaires, quelle place occupe l’Algérie dans la stratégie de déploiement de l’Otan dans notre région, sachant que notre pays n’est partie au partenariat méditerranéen de cette organisation que depuis 2000 ? 
S’agissant des relations de l’Otan avec notre pays, le moins qu’on puisse dire est qu’elles ont rarement été sereines et cela depuis la guerre de Libération nationale. On se rappelle que l’armée coloniale a souvent eu recours à du matériel de guerre de l’Otan, notamment les avions américains Sikorski dans sa répression de la résistance nationale et de la population civile algérienne. C’est là un fait historique que les Algériens ne peuvent oublier.
Plus récemment, lorsque l’initiative de dialogue méditerranéen avait été lancée en 1994 par le Conseil de l’Atlantique Nord sur la base de l’interaction entre la sécurité et la stabilité en Europe et celles en Méditerranée, l’Algérie en avait été exclue. C’était l’époque où notre pays subissait un embargo occidental, notamment sur le matériel et la technologie militaires, et ce, sur la base de la tendancieuse question du «qui-tue-qui ?». Ce n’est qu’en mars 2 000 que notre pays fut admis parmi les 7 pays méditerranéens membres du dialogue en question.
Le dialogue sur la Méditerranée lancé par l’Otan en janvier 1994 conjointement avec le partenariat «PPP» «a pour but de contribuer à la sécurité et à la stabilité dans la région méditerranéenne, de parvenir à une meilleure connaissance et compréhension mutuelle et de dissiper, dans les pays participants, les malentendus toujours possibles au sujet de l’Otan, de ses missions et de ses objectifs».
Pour rappel, l’intervention de l’Otan en Libye avait été critiquée par les autorités algériennes et l’opinion nationale sur la base du principe du refus de toute ingérence étrangère dans ce pays. Pour sa part, la revue de l’armée, El Djeich, avait consacré, en décembre 2005, une série d’articles à la relation Algérie-Otan pour rappeler aux partenaires de notre pays sa vision en matière de sécurité. La revue soulignait que «l’Algérie fonde sa politique de coopération sur l’unité et l’indivisibilité de la sécurité, une approche globale et équilibrée de la sécurité, le dialogue et la concertation pour favoriser le rapprochement entre les peuples et l’instauration de la paix et de la stabilité régionale». Une vision que l’Otan doit intégrer dans son programme de coopération.
C’est dans ce contexte qu’était intervenue, en novembre 2004, la visite du secrétaire général de l’Otan à Alger pour «relancer le dialogue méditerranéen». Le même mois s’était tenue à Bruxelles la réunion ayant regroupé les chefs d’état-major des pays de l’Otan et leurs homologues des 7 pays méditerranéens sur le thème de la lutte antiterroriste. Au sein de l’Otan, il faut souligner que le dialogue est établi essentiellement sur une base bilatérale. Chaque partenaire de l’Otan choisit son propre «programme-menu» adapté à ses besoins spécifiques. La mise en œuvre du partenariat était confiée au Groupe de coopération méditerranéenne, remplacé, en 2011, par le Comité politique et du partenariat.
En mars 2018, le secrétaire adjoint de l’Organisation en visite de 2 jours en Algérie avait mis l’accent sur le rôle pivot de notre pays en termes de sécurité et de stabilité régionales en rappelant : «Il faut qu’on comprenne et qu’on apprenne de ce que l’Algérie a fait pendant toutes ces années pour la stabilité de la région.»
En effet, la 2e plus puissante armée d’Afrique et la 28e dans le monde (édition 2020 de Global Fire Power) disposait en 2015 d’un budget de 9,37 milliards de dollars (contre 11 en 2014), de 9,6 milliards US$ d’importations militaires en 2018. 
Les statistiques les plus récentes de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri) indiquent que notre pays a dépensé durant l’année 2019 10,334 milliards de dollars pour l’armement (1er pays africain et maghrébin), contre 9, 584 milliards de dollars l’année précédente. Soit une hausse de 7,83%. 
Par ailleurs, avec des effectifs de 130 000 actifs et 150 000 réservistes en plus d’un équipement moderne, varié et performant auxquels s’ajoute une précieuse expérience dans la lutte antiterroriste, l’ANP est un partenaire de poids pour l’Otan. 
Par ailleurs, l’avant-projet de Constitution en cours de débat national comporte une disposition relative à la possibilité d’envoi de troupes algériennes hors des frontières nationales par les autorités politiques algériennes, plus précisément le président de la République, après accord du Parlement, qui, si elle est adoptée par le peuple, ouvrira  certainement le champ à de nouvelles perspectives de coopération avec l’Otan que le gouvernement algérien aura à définir en commun avec les dirigeants de l’Organisation atlantique.
Les initiatives d’ordre sécuritaire concernant la région, qu’elles émanent de l’Otan ou d’ailleurs, sont suivies de très près par notre pays. En témoigne la réaction des médias algériens en mai 2015 lorsque le président américain B. Obama avait évoqué, en recevant son homologue tunisien, le défunt B. Kaid Essebsi, l’octroi, à la Tunisie, du statut d’«allié majeur non membre de l’Otan» devant permettre à ce pays d’entretenir une «coopération renforcée avec les Etats-Unis pour l’achat et la fabrication d’armes».
Un média électronique algérien avait qualifié la déclaration du président américain Obama de «mauvaise nouvelle (en tout cas) pour l’Algérie qui avait souffert de la machine de guerre atlantiste pendant la guerre de libération et qui a à subir aujourd’hui les desseins de cette organisation militaire qui a tendance à finaliser son projet d’encerclement de notre pays».  Trois années plus tard, en février 2018, le ministre tunisien de la Défense a révélé que son pays avait refusé la proposition de l’Otan d’assistance au «contrôle des opérations militaires et à l’analyse de l’information sécuritaire dans un centre de contrôle de l’armée tunisienne près de la frontière algérienne». Certains observateurs considèrent que la réponse tunisienne a été inspirée par Alger.
Sans avoir à cultiver la paranoïa de «l’ennemi permanent», la coopération avec l’Otan, tant qu’elle se fait sur la base d’une relation équilibrée et d’un transfert de know how technologique et stratégique militaires,  sera acceptée… prudemment, en demeurant ferme sur le principe d’indépendance de la décision et le souci de la défense des intérêts nationaux. 
En ce tumultueux début du XXIe siècle, la géopolitique internationale, perturbée par les tensions et conflits qui secouent la planète, notamment au Moyen-Orient et en Afrique dans un contexte de course aux armements et de résurgence de la guerre froide et davantage par les conséquences de la crise économico-financière dite des subprimes, en 2008, et la pandémie en cours du virus corona qui ravage la planète, s’identifie progressivement à un processus de substitution d’un monde bipolaire à un autre tripolaire axé sur la volonté d’affirmation de la puissance de trois empires antagoniques : américain, chinois et russe, au lieu des cinq «prédits» par le «cartomancien» B.-Henri Levy. 
L’attitude de Trump envers ses alliés dans l’Otan, notamment les pays d’Europe occidentale, trouve sa raison dans au moins 3 éléments du passé. D’abord ce sont les USA qui sont à l’origine de la création de l’Organisation (Traité de Washington du 4 avril 1949), l’intervention américaine, même tardive, en Europe occidentale lors des deux conflits mondiaux a été décisive pour sauver l’Europe de l’effondrement total et enfin c’est l’assistance économique et financière à travers le Plan Marshall, en 1948, qui a permis à l’économie du Vieux Continent de se refaire progressivement une santé. Et cela, si les jeunes dirigeants européens, à l’image de Macron, l’ont oublié, Donald Trump et les leaders qui l’ont précédé à la Maison-Blanche certainement pas. 
Et ils entendent le faire savoir concrètement et à en tirer la substance de la suprématie de leur pays. Par conséquent, la perspective de réélection de Donald Trump en novembre 2020 doit inquiéter plus d’un tant parmi ses adversaires démocrates qu’au sein de ses alliés occidentaux comme la France qui craignent que «la tentation ne soit alors forte, pour lui (Trump), de quitter l’organisation et de la remplacer par des alliances bilatérales rénovées. 
Or, un retrait américain de l’Otan précipiterait assurément l’agonie d’une organisation déclarée en «mort cérébrale» par Emmanuel Macron. L’actuel président français n’est pas De Gaulle, l’URSS et le Pacte de Varsovie ont disparu et ne reste plus que l’Amérique de Trump, pour l’Occident. Personne au sein de l’Otan ne souhaite la disparition de l’Organisation. Tout comme personne ne souhaite le retrait américain même au prix d’une politique de défense commune, intégrée et autonome en Europe, surtout occidentale.  
L’Otan, en tant qu’instrument de domination politique et militaire, reste au service de l’empire américain quand bien même son action dans le monde puiserait sa justification dans les principes et idéaux démocratiques de l’Occident, unilatéralement décrétés par ce dernier «valeurs universelles».
M. Z.

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