Vies humaines et intérêts économiques



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Par Dr Bachir Chara(*)
Première partie : les guerres
La démographie galopante a permis à la population mondiale d’atteindre le chiffre de 7,7 milliards d’êtres humains au 1er janvier 2019. Le nombre d’êtres humains sur terre a plus que triplé (3,5 fois) en 70 ans (1950 – janvier 2020) ; alors que, «durant le siècle 1850-1950, il n’avait même pas doublé. Il est passé de 1,2 milliard à 2,3 milliards de personnes, chiffre qualifié, à ce moment-là, de très important, du fait qu’une telle situation ne s’est jamais produite au cours des nombreux millénaires qui ont précédé» (revue Persée, 1951 )  quelques aspects fondamentaux de l’économie mondiale, première partie, les grands problèmes de la population mondiale (Économie et statistique, presse universitaire de France). 
À cette cadence, la population mondiale atteindra, selon les Nations unies, neuf milliards sept cents millions d’êtres humains en 2050 et onze milliards en l’an 2100 (AFP, 19 juin 2019). S’appuyant sur cette explosion démographique, certains dirigeants de ce monde, qui hier militaient pour l’augmentation de la longévité des êtres humains, en développant la médecine, l’industrie médicale et celle du médicament, qui ont permis à leurs citoyens d’avoir une espérance de vie moyenne atteignant les 80 ans et à leurs pays d’engranger des moyens financiers considérables par la commercialisation des médicaments et des équipements médicaux, pensent aujourd’hui qu’il faut réduire la population mondiale car, selon eux, l’économie mondiale et les ressources naturelles de la planète Terre ne pourraient plus répondre aux besoins de telles populations. 
Cette réflexion ne date pas d’aujourd’hui, elle remonte à la fin des années 1979, quand Robert Strange McNamara, secrétaire d’État américain de la Défense, avait déclaré, lors des travaux du Club de Rome, que «la planète Terre ne peut supporter une telle explosion démographique qui constitue le grand blocage pour le développement économique et social dans le monde et qu’il fallait éviter maintenant et non demain que la population mondiale n’atteigne dix milliards d’habitants. Pour cela, nous avons deux solutions, soit réduire le taux de natalité ou augmenter celui de la mortalité, ce qui ne peut être réalisé qu’à travers les guerres ou les maladies». 
Quand on analyse cette déclaration, il ressort que la réduction de la population devait concerner les autres peuples pas les Américains, qui, au contraire, doivent continuer à vivre dans l’opulence. Ce qui corrobore d’ailleurs les déclarations et les décisions prises par les dirigeants américains. Sans se soucier des dommages que leur pays, les État-Unis d’Amérique, provoque à l’environnement planétaire, par ses industries polluantes et le rythme de vie de sa population, qui génère 25% du total mondial des gaz à effet de serre avec 5% de la population du globe, les dirigeants américains maintiennent le cap, en disant nous n’allons pas nous excuser pour notre mode de vie, nous le défendrons sans relâche (Barack  Obama, discours d’investiture) ou encore America First (Amérique d’abord) de Donald Trump, lors de son discours d’investiture le 20 janvier 2017, et d’enchaîner, plus tard : «J’ai été élu par les habitants de Pittsburgh et non par ceux de Paris» (Biosphère, le point de vue des écologistes : Trump ou pas, le climat se réchauffera quand même). D’ailleurs, il a mis ses dires à exécution en se retirant du traité de Paris sur l’environnement (COP21), comme l’a fait avant lui George Walker Bush pour le protocole de Kyoto en 2001. 
Rappelant qu’un bébé américain, qui vient au monde produira 1 644 tonnes de CO2 soit 5 fois plus qu’un bébé chinois et 91 fois plus qu’un enfant du Bengladesh (Audrey Garric, Blog éco journal le Monde, 18 janvier 2010) ; donc ce n’est pas un problème de taux de natalité comme l’a déclaré Robert Strange McNamara, mais plutôt une question de mode et de rythme de vie. Accuser à tort les pays sous-développés, où il y a les plus forts taux de natalité, n’est en fin de compte qu’un subterfuge, car ces pays ne sont pour rien ni dans la problématique climatique actuelle ni dans la situation économie mondiale. 
Pour ce qui est des changements climatiques ce sont plutôt les donneurs de leçons américains et occidentaux qui en sont la cause. Si certains ont reconnu leurs responsabilités, d’autres persistent dans leur hégémonie à l’instar des Américains et tout récemment le président brésilien Jair Bolsonaro, qui s’emploie à détruire la forêt amazonienne à travers les explorations gazières et pétrolières ; le défrichement, pour installer des cultures industrielles, notamment celles destinées à la production de biocarburants, les recherches aurifères et autres minerais. Tandis que pour l’économie, c’est plutôt le système capitaliste qui commence à montrer ses limites du fait qu’il était basé sur l’appropriation des richesses des autres, qui maintenant sont soit en cours d’épuisement, soit utilisées par les pays pour développer leur propre économie. 
Dans les deux cas de figure, les Occidentaux cherchent d’autres moyens pour subtiliser ces ressources et continuer à assurer à leurs peuples une vie prospère. Mais pour atteindre leurs objectifs, les Américains et autres utilisent tous les subterfuges, afin de tromper la vigilance des peuples et faire admettre leur macabre projet. Ils utilisent les organisations internationales, les ONG et les forums pour commercialiser leurs idées et entamer leur entreprise.  
La stratégie américaine est apparue, depuis la déclaration de McNamara, au grand jour. Elle consistait à créer des situations d’instabilité permanente dans les pays qui disposent de ressources naturelles qui intéressent les économies occidentales pour les asservir et leur soutirer ce qui reste de leur patrimoine. 
Aussitôt dit aussitôt fait, les dirigeants américains trouvent la faille, qui leur permet de commencer leur projet macabre, pour avoir la mainmise sur les ressources énergétiques de la mer Caspienne et du Moyen-Orient, mettre en place des bases militaires en Asie centrale et dans les pays arabes du Golfe dans un but géostratégique, pour contrecarrer l’influence de l’URSS et de la Chine, principaux adversaires économiques et militaires, et de renforcer l’existence d’Israël dans cette région du monde, jusqu’à épuisement des ressources naturelles des pays arabes du Golfe. La réduction de la population musulmane dans le monde est également un objectif inavoué. 
En pleine guerre froide et sous le prétexte fallacieux de combattre le communisme, les USA ont saisi l’occasion offerte par le conflit afghan qu’ils ont, sournoisement, favorisé, pour se ranger, avec l’Arabie Saoudite qui aspire à un leadership musulman, du côté de la mouvance islamiste afghane, qu’ils ont soutenue contre le régime communiste de Mohamed Najibullah, appuyé par l’URSS. 
Cette guerre, qui s’est étalée du 27 décembre 1979 au 15 février 1989, s’est soldée par la mort de 26 000 Soviets, 108 000 Afghans (loyalistes+Moudjahidine) et 562 000 civils afghans (Lacina Bathani, Gleditcch Nils Petter, Monitoring Trends in global combat : New Dataset of Battle Deaths, European Journal of population 21 :154, 2005) à 2 000 000 de civils afghans (Noor Ahmed Khalidi, Afghanistan Demographic Consequences of war : 1978 – 1987, Central Asian Survey, volume 10, n°3 p. 101-126, 1991). Additionnez à ces morts les centaines de milliers de blessés, de handicapés et de personnes atteintes de maladies graves (hépatite,  typhus, paludisme, amoebose, méningite), (Philippe Sidos, La contre-insurrection soviétique en Afghanistan 1979-1989, Stratégique, Vol.100-1001, n°2-3,2012, p. 137-170)] et les millions de civils afghans qui ont quitté le territoire pour se réfugier dans les pays voisins (Iran, Pakistan, Turkménistan, Kazakstan, Turquie) et d’autres pays d’Asie et d’Europe. 
Le retrait des troupes soviétiques a été suivi  par des combats fratricides entre les Moudjahidine et les loyalistes de Najibullah  (1989-1992) qui ont conduit à la chute du régime communiste avec au passage 50 000 morts environ. Après la chute du régime communiste, et malgré l’accord de Peshawar qui devait instaurer la paix et le partage du pouvoir entre les différentes factions islamistes, excepté celle dirigée par Gulbuddin Hekmatyar, qui s’oppose à l’accord en continuant la guerre pour prendre la totalité du pouvoir. Cette guerre de leadership qui opposera Hekmatyar aidé par le Djoumebesh d’Abdul Rashid Dostom aux partisans de l’accord de Peshawar, se déroule principalement autour des grandes villes (Kaboul, Mazar-e Sharif et Kandahar) et qui verra la prise de Kaboul par les partisans de l’État islamique et l’intronisation de Burhanuddin Rabbani à la présidence afghane. Mais cela n’a pas arrêté les hostilités, qui se sont poursuivies entre les différentes factions rivales. Les unes chiites soutenues par l’Iran et les autres sunnites appuyées par l’Arabie Saoudite. C’est la guerre des tendances religieuses qui s’est mise en place. De mars 1992 à juillet 1994, les affrontements se sont traduits par plus de 30 000 morts, recensés au sein des factions rivales et des civils. 
Émerge alors le mouvement des talibans en août 1994, avec comme objectif de libérer l’Afghanistan de ses seigneurs de guerre corrompus et instaurer un État islamique pur. Ils bénéficient rapidement de l’aide du Pakistan, qui voit en eux une force capable de prendre le pouvoir et établir une certaine stabilité qui leur sera favorable pour s’ouvrir la route du commerce avec les pays de l’Asie centrale et voir les 3 000 000 de réfugiés afghans retourner chez eux, vu qu’ils commençaient à constituer un lourd fardeau pour le Pakistan. Jusqu’à la prise du pouvoir par les talibans en 1996, plus de 2 000 morts ont été recensés.
Entre janvier et septembre 1996, les talibans sont revenus en force pour la prise de Kaboul aidés dans leur tâche par le Pakistan, Al-Qaïda (organisation salafiste fondée par Chikh Abdullah Yusef Azzam et son lieutenant Oussama Ben Laden), soutenu par l’Arabie Saoudite. Les affrontements se sont donc poursuivis entre les talibans et les ennemis d’hier Hekmatyar et Shah Massoud qui se sont coalisés. 
Les talibans prennent Kaboul dans un Afghanistan scindé en quatre. Les provinces du nord occupées par les chefs de guerre (Ahmed Shah Massoud, Abdul Rashid Dostom et Hezb-e Wahdat) et celles du sud mitoyennes avec l’Iran et le Pakistan jusqu’à Kaboul entre les mains des talibans qui mettent en place l’Émirat islamique d’Afghanistan.
En août 1998, les talibans s’emparent de Mazar-é Sharif, occupé précédemment par Abdul Rashid Dostom et occupent désormais 80% du territoire afghan. Les seules résistances qui persistaient sont les forces d’Ahmed Shah Massoud et Hezb-e Wahdat. Le 9 septembre 2001, un attentat-suicide entraîne la mort du commandant Massoud. Le nombre de morts durant cette période qui pourrait se chiffrer en plusieurs milliers de morts n’a pas été recensé.
Jusque-là les USA ne jouaient que le rôle de soutien diplomatique et de fournisseur d’armes. Mais après le 11 septembre 2001, ils sont devenus partie prenante dans le conflit afghan, à la suite des attentats qui ont touché New York et Washington, avec un très lourd bilan de plus de 3 000 victimes. Incriminant Al-Qaïda, alors des analystes politiques pensaient que c’était l’œuvre du Mossad israélien, afin de pousser les Américains à intervenir en Afghanistan et surtout au Moyen-Orient, pour modifier les données géostratégiques dans la région et renverser les équilibres des forces militaires, pour qu’elles soient en faveur d’Israël.
Même si les Américains connaissaient, certainement, les vrais commanditaires de ces attentats. Ils choisissent la voie qui devait leur permettre, plus tard, d’avoir la mainmise sur les ressources pétrolières et gazières de ces régions du globe d’autant plus que la présidence des États-Unis d’Amérique était entre les mains de George Walker Bush, un des faucons du pétrole américain. 
La stratégie américaine était, bien entendu, axée sur le contrôle des ressources énergétiques de la mer Caspienne et du Moyen-Orient qui constituent les plus grandes réserves de pétrole et de gaz au monde. Utilisant ce malencontreux événement, ils se sont donné le droit d’intervenir directement dans le conflit afghan sous prétexte qu’ils allaient combattre le terrorisme d’Oussama Ben Laden, entraînant avec eux 39 pays de l’OTAN et autres, non sans arrière-pensées économiques, notamment la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, le Canada, l’Australie, la Belgique, les Pays-Bas, la Turquie, la Grèce, l’Italie, l’Espagne et le Portugal. Cette guerre engagée contre Al-Qaïda et les talibans du Mollah Omar, qui dure jusqu’à aujourd’hui, malgré le retrait de pratiquement toutes les armées occidentales à l’exception de celle des USA. Après dix-neuf ans de guerre contre les talibans, 150 000 morts (Courrier international - Paris, 29/2/2020) sont venus s’ajouter au bilan déjà très lourd de cette guerre d’Afghanistan. 
C’est également les Américains qui ont poussé l’Irak à déclencher une guerre contre l’Iran, qui a duré de 1980 à 1989 et fait entre 680 000  et 1 200 000 morts des deux côtés. Une fois cette guerre terminée, l’Irak est encouragé, une nouvelle fois, par les mêmes Américains à envahir l’émirat du Koweït, et après sept mois d’occupation, il fut délogé par une coalition pilotée par les Américains à laquelle ont participé, pour l’Europe, le Royaume-Uni de Margaret Thatcher, la France de François Mitterrand, l’Italie, l’Espagne, la Belgique, les Pays-Bas et la Grèce ; pour les pays arabes, l’Arabie Saoudite, l’Égypte, le Bahreïn, la Syrie, Oman, les EAU ; pour l’Afrique, le Nigeria, le Niger, le Sénégal et la Sierra Leone ; pour l’Amérique du Nord, le Canada ; pour l’Amérique latine, le Honduras et l’Argentine, et pour l’Asie, la Turquie, la Corée du Sud, le Bengladesh et le Pakistan. Aucune statistique exacte n’est donnée sur le nombre de morts causé par cette guerre, il n’y a que des estimations qui oscillent entre 4 000 et 400 000 morts du côté Irakien, le chiffre de 400 000 est le plus proche de la réalité, 1 082 morts dans les rangs des Koweïtiens et 240 morts pour les coalisés (Wikipédia, Guerre du Golfe  de 1990 à 1991). Cette guerre, financée par l’Arabie Saoudite, le Koweït et les autres monarchies arabes du Golfe, n’a rien coûté aux coalisés, si ce n’est les 240 morts, mais elle a, par contre, permis aux coalisés et surtout les USA d’écouler leurs armements à prix fort, d’installer des bases militaires dans les pays de la région (Arabie Saoudite, Qatar, EAU, Irak, Bahreïn) et d’avoir la mainmise sur les ressources énergétiques de ces territoires. Agissant sous le fallacieux prétexte de la défense de la légalité internationale, certains dirigeants de pays qui espéraient récolter quelques dividendes économiques sont restés sur leur faim, car ce sont les Américains qui ont raflé la mise ne laissant que des miettes pour les autres coalisés. 
C’est en partie à cause de cela que la France de Jacques Chirac s’est opposée au déclenchement de la deuxième guerre d’Irak, qui ne servait pas ses intérêts, mais elle n’a pu l’arrêter du fait que les Américains l’ont déclenchée avec le consentement du Conseil de sécurité de l’ONU, toujours sous un prétexte fallacieux, qui accuse l’Irak de la détention d’armes chimiques de destruction massive et du soutien du régime irakien au terrorisme. Ces accusations, montées de toutes pièces, se sont plus tard révélées fausses, mais l’objectif des Américains et de leurs sbires irakiens, qu’ils préparaient, depuis fort longtemps, à prendre le pouvoir en Irak, s’est concrétisé, avec la destitution de Saddam Hussein, son jugement burlesque et son exécution. 
Il faut noter que la seule force qui pouvait à l’époque tenir tête à l’État sioniste d’Israël dans la région du Proche-Orient c’était l’Irak. L’anéantissement de ce pays mettait Israël dans une position de supériorité militaire dans cette région du monde arabe. Le nombre de morts provoqué par cette deuxième guerre du Golfe s’est élevé à 121 411 morts dont 113 728 Irakiens (journal Le Monde du 16 décembre 2011, bilan - la guerre d’Irak, combien de morts) et 7 683 du côté des coalisés, chez lesquels les Américains et les mercenaires ont payé le plus lourd tribut avec respectivement 4 483 et 1 554 morts (Wikipédia, la seconde guerre du Golfe). 
Le nombre de morts, dans les «opérations de lutte contre le terrorisme», du 11 septembre 2001 au 20 février 2020 a été évalué à 507 000 âmes. La plus grande partie est constituée de civils appartenant à trois pays, qui sont l’Irak, l’Afghanistan et le Pakistan avec respectivement 204 275, 38 480 et 23 372 morts (journal électronique de Montréal, Com). Le nombre d’activistes morts n’est quant à lui pas recensé. Par contre, du côté des coalisés, on ne signale que quelques milliers de morts. Le nombre le plus important concerne bien sûr les Américains qui ont perdu 1909 hommes (journal Le Point du 21/2/2020, communiquant les chiffres de l’AFP).  Les tentatives de déstabilisation de l’Algérie à partir de 1993, suite à l’annulation des résultats des élections législatives, sous l’impulsion des salafistes et des puissances occidentales, avec l’utilisation des «Afghans», qui ont duré toute une décennie, dénommée actuellement décennie noire, s’inscrivent également dans cette stratégie homicidaire, se sont également traduites par un nombre considérable de morts. Aucune statistique officielle n’existe, mais tout le monde s’accorde à dire qu’il y a eu plus de 200 000 morts. Jusqu’à aujourd’hui, on enregistre, de temps à autre, quelques dégâts chez les civils et les militaires, provoqués par les mines artisanales déposées à l’époque dans les maquis par les intégristes. 
La guerre de Libye, déclenchée par une coalition franco-britannique, aidée par l’OTAN et même des pays arabes qui voulaient se partager le gâteau libyen, s’est terminée par la destitution du régime de Mouammar El-Kadhafi, qui constituait un danger pour l’Occident avec ses idées africanistes, notamment la création d’une monnaie africaine, qui gênerait le dollar américain et surtout la France, qui contrôle les banques centrales des pays de l’Afrique central et de l’Ouest (BEAC - BCEAO), d’où elle prélève des sommes considérables d’argent évaluées à plusieurs centaines de milliards d’euros par an. Le défunt président français Jacques Chirac reconnaissait ce fait en déclarant : «Nous avons saigné l’Afrique pendant quatre siècles et demi. Ensuite, nous avons pillé ses matières premières ; après on a dit : ils [les Africains] ne sont bons à rien. Au nom de la religion, on a détruit leur culture et maintenant, comme il faut faire les choses avec plus d’élégance, on leur pique leurs cerveaux grâce aux bourses. Puis on constate que la malheureuse Afrique n’est pas dans un état brillant, qu’elle ne génère pas d’élites. 
Après s’être enrichi à ses dépens, on lui donne des leçons.» C’est en défiant et en voulant mettre en péril les économies occidentales que Mouammar El-Kadhafi l’a payé de sa vie, assassiné avec la complicité du président français de l’époque et l’activisme du pro-sioniste Bernard-Henri Lévy qui a réussi à embobiner les chefs de tribus libyennes. Cette guerre qui se poursuit toujours en guerre civile, entre trois factions rivales, qui se disputent le pouvoir, n’est pas près de se terminer. Elle a jusqu’à maintenant fauché 14 500 personnes  environ et le compte n’est pas terminé.
Avec l’escalade qui s’affiche à l’horizon entre l’Égypte et la Turquie, sur le territoire d’un autre pays, avec des intentions, pour les deux parties, de s’accaparer de ses ressources naturelles, c’est également les armées de deux pays musulmans qui vont payer de leur sang. Mais ceux qui profiteront réellement de cette éventuelle confrontation vont être les puissances occidentales qui ont un œil sur les réserves pétrolières, gazières et aquatiques libyennes. Il faut noter que l’eau est en train de devenir une substance stratégique pour certains pays, qui n’ont pas réussi à préserver leurs ressources propres. 
L’aide israélo-américaine à l’Éthiopie, pour la construction du grand barrage de la renaissance, qui vient d’être mis en service, ne s’inscrit-elle pas dans cette problématique de guerre libyenne qui pointe à l’horizon ? Probablement, car les eaux du Nil vont devenir de plus en plus rares du fait qu’elles seront, en partie, bloquées par ce gigantesque barrage, ce qui rendra à terme la vie difficile aux Égyptiens. Les visées de l’Égypte à travers cette guerre qui se profile ne répondent-elles pas à cet objet d’exploitation de la nappe albienne que partagent la Libye avec les autres pays riverains ? Quoi qu’il en soit, une telle guerre pourrait se révéler catastrophique pour l’Égypte qui sera confrontée, pas uniquement à la Turquie, mais à tous les pays du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), dont la Turquie fait partie. Dans ce cas la sagesse est recommandée, car quel que soit le résultat de cette éventuelle guerre, c’est encore les musulmans qui vont y laisser des plumes.
La guerre de Syrie, l’autre hécatombe, initiée par la coalition internationale toujours sous le patronage des Américains et les idées trompeuses de démocratisation de la Syrie et de la lutte contre le terrorisme, alors qu’il s’agit plutôt d’une question d’intérêts économiques et géostratégiques. Qui a vu la disparition  de 380 000 hommes dont 116 000 civils et 22 000 enfants (Agence France Presse, 14/03/2020 chiffres repris par le journal le Point) et la guerre n’est pas encore terminée. Après plus de deux décennies d’immobilisme, les Russes se sont rendus à l’évidence, qu’à travers cette guerre de Syrie, leurs intérêts étaient en jeu tant sur le plan économique que géostratégique et sécuritaire.
Ce qui les a conduits à contrecarrer les visées des Occidentaux en général et des Américains en particulier, en prenant parti  pour le gouvernement syrien, sept années après le déclenchement du conflit, dont le sioniste Bernard-Henry Lévy avait mis le feu aux poudres.

Sans l’entrée en scène de la Russie dans ce conflit, le régime syrien aurait était mis à terre et Israël sécurisé au moins sur ses frontières nord malgré la présence du Hezbollah au Liban. Ce qui lui restait c’est d’avoir des dirigeants arabes favorables à son existence tout en évitant le rapprochement de ses frontières de régimes soutenus par l’Iran, pays qui constitue un danger pour Israël.
C’est dans cette problématique qu’est intervenue la guerre civile déclenchée en 2014 au Yémen entre les chiites houthis et les forces fidèles à l’ex-président du Yémen Ali Abdellah Saleh, qui s’est internationalisée en 2015 avec l’entrée en lice, aux côtés des forces présidentielles et des combattants tribaux, d’une coalition de pays arabes, formée de l’Arabie Saoudite, des EAU, de l’Égypte, du Bahreïn, de la Jordanie, du Qatar (jusqu’en 2017), du Koweït, du Soudan et du Maroc (jusqu’en 2019). Ces pays étaient également soutenus par les USA sur le plan de l’information, la Turquie, le Sénégal, la Mauritanie, la Somalie et Djibouti sur le plan diplomatique. Les chiites houthis étaient, quant à eux, soutenus par les Gardes républicains (jusqu’en 2017), des paramilitaires dont les forces spéciales et le Hezbollah (selon la présidence yéménite) ; l’Iran et la Corée du Nord qui les soutenaient diplomatiquement et en armement. Cette guerre, qui se poursuit toujours, a fait au moins
100 000 morts dont 12 000 civils (Frédéric Autran, la guerre au Yémen a fait plus de 100 000 morts, journal Libération du 1er novembre 2019).
On ne peut terminer d’évoquer ces conflits visant la réduction de la population musulmane mondiale et les extorquer de leurs richesses naturelles, sans évoquer les actions qu’entreprend la France, aidée par quelques pays de l’Union européenne, dans le Sahel africain. 
En effet, ce pays cherche également à travers le déploiement de son armée au Tchad, au Niger, au Mali, au Burkina Faso et en Mauritanie (pays du champ, formule utilisée pour désigner les anciennes colonies françaises), à préserver ses intérêts économiques. Toujours sous le prétexte de la lutte contre le terrorisme, qui existe malheureusement, mais favorisé par des centres d’intérêt, la France a déployé dans le Sahel, dès le premier août 2014, la force Barkhane. Selon le bilan établi par l’armée française, plus de 1 200 djihadistes ont été éliminés depuis le début du déploiement de cette force jusqu’à la fin du premier semestre 2020. Les pertes françaises ne sont, bien entendu, pas précisées.  
Au vu de ce qui précède, on peut conclure que les propos de Robert Strange McNamara n’avaient aucune portée humanitaire, ni protectionniste de l’environnement mondial. Mais plutôt une stratégie consistant à faire admettre à la communauté internationale, notamment occidentale, la nécessité des guerres pour qu’ils préservent et renforcent leurs intérêts économiques. Compte tenu du fait que la région du Moyen-Orient regorge de ressources naturelles indispensables aux économies occidentales et pour avoir la mainmise sur elles, il fallait poursuivre l’acte de déstabilisation de la région engagé par la Grande-Bretagne, qui a introduit un élément étranger dans le corps de la péninsule Arabique, à savoir Israël. 
Pour ce faire et avec la complicité du royaume d’Arabie Saoudite, dont les dirigeants, grâce à leurs pétrodollars, se veulent être les leaders du monde arabo-musulman et leurs acolytes les émirats du Golfe qui cherchent une protection des Américains vu qu’ils se sentent menacés par les voisins syriens, irakiens et iraniens ; les Américains ont mis en œuvre leur plan consistant, d’une part, à s’accaparer à moindres frais des ressources naturelles de ses pays, à leur vendre leurs armements pour s’entretuer, tout en implantant dans leurs territoires des bases militaires qui leur permettent d’asseoir et d’étendre leur hégémonie. 
Il ne faut pas oublier également le rôle néfaste et combien intéressé joué par certains mercenaires, traîtres, travaillant contre les intérêts de leurs pays d’origine, dans cette tragédie qui n’a pas encore livré tous ses secrets. Il était clair que les pays occidentaux, hier colonisateurs, donc prélevant de façon directe les richesses des pays colonisés, qui leur ont permis d’asseoir leur suprématie tant sur les plans militaire qu’économique, ont soit volontairement, soit sous la pression des guerres, accepté que leurs anciennes colonies accèdent à l’indépendance, avec comme arrière-pensées de continuer à soutirer leurs richesses à moindres frais et sans pertes humaines. La stratégie échafaudée pour cette fin consistait à implanter leurs acolytes (traîtres) dans les organes de décision des anciennes colonies et de laisser derrière eux leurs compatriotes ou leurs sbires qui géreront, pour leur compte, les économies des pays nouvellement indépendants. Le général de Gaulle n’avait-il pas fait part, dans le cas de l’Algérie, d’une confidence lourde de sens à savoir : «Nous avons laissé
140 000 harkis infiltrés dans les rangs de l’ALN» à son fils qui l’a révélé dans son livre Mon père de Gaulle ? Il faut rajouter à ces harkis, les autres supplétifs que la France utilisait au sein de son administration coloniale dont le nombre total (harkis+supplétifs) a été évalué à 400 000 hommes (Pierre Daum — Le dernier tabou — édition Soun Actes Sud). Ce cas de l’Algérie, la France l’a mis en œuvre dans tous les pays qu’elle avait comme colonies, ce qui lui a permis, plus de soixante ans après leur indépendance, de continuer à puiser dans leurs ressources minières, matérielles et humaines. Dans leur stratégie, les Américains se devaient, dans un premier temps, d’isoler l’URSS du champ des pays de l’Asie centrale en général et de la péninsule Arabique en particulier, et dans un second temps, renforcer la présence israélienne dans cette région du globe et s’installer durablement jusqu’à épuisement de ses ressources énergétiques. Ils ont commencé leur œuvre en Afghanistan (pays musulman), avec pour objectif final les pays du Golfe. Les dindons de la farce sont donc les pays arabes ou plutôt les pays musulmans, en rajoutant l’Iran, les Rohingyas (Birmanie) et le conflit indo-pakistanais qui ont payé un lourd tribut et continuent de le faire. Cette escalade, qu’on peut qualifier de guerre des croisades, est malheureusement incitée et soutenue par certains dirigeants arabes et musulmans qui participent même aux opérations de destruction de leur civilisation arabo-musulmane. Cette participation active de ces dirigeants ne répond qu’à un seul objectif, se maintenir au pouvoir au nez et à la barbe de leurs populations. Maintenant que les Américains sont bien installés dans cette région du globe, Donald Trump n’avait-il pas dit que «les États du Golfe doivent payer s’ils veulent que les USA assurent leur protection» ? Par rapport à qui ? Sans le dire, il voulait insinuer les autres pays arabes ou musulmans. Ces pays arabes du Golfe sont donc devenus de fait des protectorats, avec le consentement de leurs dirigeants. La question qui mérite maintenant d’être posée, jusqu’à quand les pays arabes et les pays musulmans demeurent le théâtre de ces guerres fratricides et meurtrières, avec souvent la complicité de certains de leurs dirigeants et des traîtres qui sont à la solde des pays occidentaux ? Pour les Américains et les Israéliens, l’objectif est doublement atteint. En effet, l’Arabie Saoudite et les Émirats arabes unis (EAU) sont de plain- pied dans l’escarcelle des Américains et surtout des Israéliens avec lesquels ils viennent d’instaurer des relations diplomatiques. D’autres États arabes, notamment ceux du Golfe, vont très certainement suivre le pas des Émirats arabes unis et normaliser les relations diplomatiques avec l’État sioniste, chose qu’il attend depuis 72 ans et qui permettra également à Donald Trump d’avoir le soutien des sionistes américains pour sa réélection à un deuxième mandat. Ce fait confirme l’hypothèse de la mise des États arabes du Golfe sous protectorat américain et que désormais leur politique étrangère se fait à Washington. 
B. C.

(*) Ex-vice-président de l’Assemblée populaire nationale. Ex-président de la Commission permanente de l’agriculture, de l’environnement et des ressources naturelles du Parlement panafricain. 


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