Non-respect du port du masque et des mesures barrières

Les spécialistes appellent à la plus grande vigilance



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Depuis quelques jours, la baisse des contaminations aidant, le port du masque et la distanciation sociale ne sont plus respectés dans les regroupements, marchés, transports publics, les lieux de loisirs. Le Pr Idir Bitam et le Dr Ilyes Akhamokh mettent en garde contre les conséquences du non-respect des mesures barrières, seuls moyens de lutter contre le virus, toujours en circulation.

Si pour le Dr Ilyes Akhamokh, membre du comité scientifique de suivi de la pandémie Covid-19, «les rassemblements et regroupements sans respect des mesures barrières sont contre-indiqués et risquent de provoquer des milliers de clusters aux conséquences sanitaires catastrophiques», pour le Pr Idir Bitam, expert des maladies transmissibles et pathologies tropicales à la direction générale de la recherche scientifique et du développement technologique, au ministère de l’Enseignement supérieur, «il est très dangereux de baisser la garde alors que le virus est toujours en circulation. Si la situation d’indiscipline se poursuit, nous allons droit vers une catastrophe».

Les deux experts s’accordent à mettre en garde contre le non-respect du port du masque et de la distanciation sociale. «La vaccination ne connaîtra pas la cadence des pays européens. Le nombre de doses est dérisoire par rapport à celui des pays européens. Si la situation d’indiscipline se poursuit, il faut s’attendre à une flambée des contaminations dans une dizaine de jours», ajoute le professeur Idir Bitam.

Cette crainte est légitime. Depuis, le déconfinement opéré il y a quelques jours par les autorités, à travers la réouverture des restaurants, des grandes surfaces, des espaces de loisirs, etc., coïncidant avec la baisse du nombre des contaminations et des décès, les Algériens ont vite laissé tomber le port du masque et la distanciation sociale. Dans les bus, les marchés, les magasins, les centres et les aires de loisirs, rares sont les personnes qui portent le masque, alors que les regroupements se sont multipliés aussi bien dans les espaces fermés qu’ouverts.

Pour le professeur, «avec ce relâchement perceptible, dans une dizaine de jours ou moins, il faut s’attendre à une hausse des chiffres. Le virus est encore parmi nous. Les plus vulnérables, comme les malades chroniques, les personnes âgées et autres, seront les premières victimes. Nous copions ce qui se fait en Europe, mais il faut prendre en considération que dans ce continent, la population est disciplinée, le taux de vaccination est très élevé, alors que ce n’est pas le cas chez nous, où le nombre de vaccinés reste dérisoire. Il n’atteindra même pas les 10% de la population. Si l’on continue à ne pas respecter les mesures barrières, il faut s’attendre à une catastrophe».

«Gare aux variants»

Le professeur insiste sur le port du masque et la distanciation pour lutter contre le virus, surtout, dit-il, que la souche qui circule encore en Algérie, n’est pas virulente.

Il explique que «la fermeture des frontières a permis d’éviter l’arrivée des nouveaux variants, qui sont déjà chez nos voisins, notamment la Tunisie, où le nombre de morts par jour a atteint les 70. Mais cela ne veut pas dire que nous sommes à l’abri». «Il nous faut impérativement un centre de surveillance de ces variants où on effectue le séquençage des souches, qui actuellement se fait en France, parce que nous n’avons pas de laboratoires type P3. A Marseille, où travaille le professeur Raoul, chaque malade hospitalisé est dépisté et la souche est séquencée. La seule indication que nous avons actuellement chez nous est l’observation des signes cliniques.

Nous ne pouvons pas être à l’abri des variants. Nous avons des frontières terrestres ouvertes. Pour preuve, nous avons eu un millier de cas de paludisme et heureusement que la souche africaine de la Covid-19 n’est pas virulente comme l’européenne», révèle le Pr Bitam, qui rappelle que la dernière vague, qui a fait monter le nombre de contaminations à plus d’un millier, a été provoquée par une souche importée de Turquie par des voyageurs qui sont rentrés en Algérie par la Tunisie, par voie terrestre.

Il conclut : «Il ne faut jamais enlever le masque, continuer à se laver les mains régulièrement et se dire qu’avec le vaccin, nous sommes de simples cobayes, parce que nous ne savons pas encore comment notre corps réagira.»

l’importance du port du masque

Abondant dans le même sens, le Dr Ilyes Akhamokh, membre du comité scientifique de suivi de la pandémie de Covid-19, rappelle lui aussi «l’importance» du respect du port du masque et de la distanciation.

Tout en constatant une baisse de vigilance, notamment dans les regroupements, il explique toutefois que «la stratégie du comité est d’aller graduellement vers le rétrécissement ou l’allégement des mesures de confinement. Les gens oublient qu’il y a une dizaine de wilayas où le confinement nocturne est maintenu. Il n’y a donc pas eu de relâchement total. Le confinement a eu un lourd tribut au niveau économique, social et psychologique. Nous sommes obligés d’aller graduellement vers le déconfinement, mais avec le strict respect du port du masque et la distanciation».

Le Dr Akhamokh relève, par ailleurs, que la population réagit selon la situation. «Nous avions remarqué que lorsque la courbe des contaminations et des décès était importante, les gens portaient majoritairement des masques. Mais dès que cette courbe a baissé, il y a eu un relâchement. Nous constatons, aujourd’hui, le non-respect du port de la bavette mais aussi de la distanciation, particulièrement dans les lieux de regroupement. Cette situation est très dangereuse. Il faut que les citoyens sachent que ce virus est toujours présent et nous réserve beaucoup de surprises, notamment avec les variants. Notre but n’est pas d’empêcher son entrée, mais de le retarder au maximum, le temps que l’immunité collective et les vaccins auront fait leur effet sur la population», souligne le Dr Akhamokh.

Il met en garde les citoyens contre les rassemblements sans respect du port du masque et de la distanciation sociale en disant : «Les rassemblements sans mesures barrières sont contre-indiqués et risquent de provoquer des milliers de clusters, avec comme conséquences la saturation des établissements hospitaliers par des formes graves de contamination. Il n’est pas question d’interdire les rassemblements, mais d’inciter les gens à se protéger et à protéger leurs familles, notamment les personnes âgées et vulnérables, par le port des masques, le lavage des mains et la distanciation sociale.»


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