Pour subvenir aux besoins du mois du Ramadhan

Les Algérois se rabattent sur le marché de l’or cassé



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A la rue Larbi Ben M’hidi et au Ruisseau, le nombre de femmes qui viennent vendre leurs bijoux est de plus en plus important. L’arrivée du mois de Ramadhan, conjuguée à la crise sanitaire et l’érosion du pouvoir d’achat des ménages, en est la principale cause.

Le nombre de personnes qui sollicite les acheteurs de l’or «cassé» est un indicateur fiable de l’état des finances des familles algériennes, nous dira une femme, ancienne vendeuse et acheteuse d’or. A la rue d’Isly, le nombre de jeunes acheteurs de «cassé» ne cesse, à son tour, d’augmenter. Les piétons sont approchés par des commerçants dès qu’ils franchissent la Grande-Poste jusqu’à la route menant vers Zeneqat Laârais, à la Basse Casbah.

Les transactions sont effectuées généralement dans la cage d’escalier des immeubles situés sur la grande route. «Sur 60 000 DA, je n’ai pris qu’un infime bénéfice de 850 DA», jure un commerçant, en mal de convaincre une femme, la cinquantaine, qui le suppliait de lui payer un peu plus cher ses bijoux.

Renseignement pris, l’on apprend que l’individu en question disait éventuellement la vérité, puisqu’il achète en deuxième main. «Les acheteurs du cassé n’ont généralement pas de fonds pour payer cache, alors ils travaillent pour quelqu’un de plus riche. Ils lui revendent sur-le-champ, encaissent et payent leur client», apprend-on. «Le grand bénéfice revient aux barons invisibles, alors que les miettes sont empochées par les jeunes qui nous abordent dans la rue», ajoute notre source. «Les prix sont déterminés par ces mêmes barons.

C’est comme les vendeurs au noir de la devise, les cambistes ne sont que des travailleurs qui gagnent à peine leur journée», explique un connaisseur du marché Dellala. Mais pourquoi, de plus en plus de femmes optent pour ce marché informel, au lieu de déposer leurs bijoux en banque en contrepartie d’une somme d’argent, avant de les récupérer en remboursant et en s’acquittant d’un taux d’intérêt fixé au préalable. Hélas, cette procédure n’est pas à la portée de tout le monde, nous explique-t-on. Il faut être solvable et avoir des rentrées régulières pour pouvoir rembourser la banque et payer le bénéfice. Faute de quoi, la banque va saisir l’objet hypothéqué, et le propriétaire se verra octroyer un prix dérisoire, encore moindre que celui du marché noir.

En conséquent, de nombreuses personnes se rabattent sur le marché du cassé. «Les gens ne cèdent pas leurs bijoux de gaieté de cœur. Souvent ils sont en crise, endettés, sans le sou. C’est le dernier recours pour subvenir aux besoins de location, de fêtes ou autres occasions…», Nous dira un acheteur d’or. Avec la crise sanitaire, l’interdiction des fêtes de mariage et le chômage, le prix du gramme d’or cassé a d’ailleurs beaucoup baissé, oscillant entre 6600 et un peu plus de 7000 DA le gramme. Les gens «bradent» parfois leurs bijoux à moitié du prix d’achat.

Hormis ceux qui détenaient de l’or acheté il y a plus de 20 ou 30 ans et croient avoir fait du bénéfice, vendre au marché informel est une mauvaise affaire qui ne profite qu’aux gros acheteurs qui décident des cours du marché et génèrent d’importants bénéfices, allant, parfois, jusqu’au double.


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