Cause toujours, Mohammed VI !



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Ainsi, nos prises de positions sur le Maroc hostile seraient la «voix de son maître», autrement, nous attendons la réaction officielle pour nous prononcer. Non, ce n'est pas vrai ! Cette chronique dénonce justement la passivité du pouvoir après un discours agressif et violent du roi Mohammed VI en novembre 2014, qui ne reçut pratiquement aucune réponse de l'équipe Bouteflika. 

Ah ! Si Boumediène était là ! Mohammed VI aurait reçu, dans les heures qui suivent sa virulente attaque contre l'Algérie, une riposte verbale vigoureuse et nette. On est comme ça chez nous, les révolutionnaires : on ne se tait pas devant l'outrage et la diffamation, surtout quand ils proviennent des agents les plus médiocres de l'impérialisme, ses serviteurs zélés et les protecteurs vigilants de ses biens en terre maghrébine. Tout ce que n'est pas le vaillant peuple marocain qui a tissé, par le feu et le sang, des légendes de bravoure et de patriotisme inscrites en lettres d'or dans notre histoire commune. Ce peuple est malheureusement berné par une cause fallacieuse devenue «sacrée», celle de l'occupation d'un territoire étranger, et qui demeure, malgré toutes les tentatives d'en masquer la nature, un problème de décolonisation tel que reconnu par les Nations-Unies. L'Algérie ne donne pas d'ordre à l'organisation internationale ; considérée comme «observateur» par l'instance onusienne, elle tente, tant bien que mal, de jouer son rôle le plus loyalement possible. Visiblement, c'est ce qui irrite le Maroc officiel. Une bonne nouvelle : l'ONU va probablement changer le statut de l'Algérie et de la Mauritanie qui ne seront plus «observateurs» dans cette affaire. Le Maroc sera, seul, face au Polisario et à la communauté internationale. Plus d'Algérie pour détourner le problème !
C'est pourtant le royaume chérifien qui renie ses propres engagements. Reçus par le défunt roi Hassan II, en août 1988, nous avions alors écouté un langage de sagesse puisque, à ce moment-là, le royaume acceptait le principe d'un vote exprimant le libre choix du peuple sahraoui. Ceux qui ont la mémoire courte devraient consulter l'enregistrement de cette interview tenue au Palais de Skhirat. Mais n'en concluez pas que Hassan II était un enfant de chœur ! Il ne voulait certes pas heurter la volonté internationale, ni s'attirer les foudres de l'ONU, mais il agissait concrètement pour inverser le sens du vote, en envoyant des Marocains du Sud au Sahara Occidental afin de grossir les listes électorales. À ce moment-là, la pomme de discorde était l'appréciation que chacun avait de ces listes, les chefs de tribus authentiquement sahraouies trouvant que l'on cherchait à les submerger par des centaines de milliers de noms étrangers au Sahara ! Au début des années 1990, il n'était nullement question de «plan d'autonomie», mais de l'identification des véritables habitants sahraouis, problème reconnu comme ardu par l'ONU qui s'attelait néanmoins à le résoudre en établissant des listes conformes à la typographie de la population locale.
Et puis, l'Algérie – principal soutien de la cause sahraouie – tomba en panne. Les islamistes – dont l’«expérience» était curieusement appréciée par... Hassan II ! – voulaient changer le caractère républicain de l'État. Ils commencèrent par démolir le slogan «du Peuple et pour le peuple», sur le fronton des mairies. Une autre devise s'installa partout : «Mairie islamique» ! Pour l'étape suivante, ils comptaient aller plus loin. L'armée intervint. Le terrorisme s'implanta. L'État chancela... Libéré, appuyé par ses tuteurs, le Maroc renia tous ses engagements précédents et, petit à petit, refusa systématiquement toute idée de consultation populaire devant déterminer le libre choix des Sahraouis, pour aboutir enfin à une solution «bricolée» qui lui aurait permis de maintenir le territoire sous la coupe de la royauté. Cette «autonomie» hypocrite est évidemment rejetée par les Sahraouis de souche.
Est-ce la faute de l'Algérie ? Je crois que si nous ne regardions que notre intérêt propre, on aurait aimé que le Polisario soit moins intransigeant et que ce problème qui nous empoisonne la vie trouve enfin sa solution afin que nous puissions nous consacrer à rattraper le temps perdu dans la construction du Maghreb. Mais le Polisario est libre et l'Algérie n'a pas pour habitude de monnayer son aide aux mouvements de libération (une des raisons qui avaient poussé les Palestiniens à choisir la lointaine Alger pour leurs grandes décisions historiques), ayant elle-même placé l'autonomie de décision de sa propre organisation révolutionnaire politico-militaire au premier rang de ses priorités.
S'en prendre violemment à l'Algérie quand la pression de l'ONU et de certaines puissances devient intolérable est une nouvelle fuite en avant, comme cette mascarade appelée «marche verte» et comme tous les subterfuges d'une politique qui, au lieu de s'attaquer lucidement au problème de fond, cherche des faux-fuyants afin de justifier et faire durer l'occupation.
Un officiel marocain m'avait dit, au cours de ce même voyage de 1988, que tout pouvait se régler et que l'Algérie gagnerait beaucoup, beaucoup, au Maroc, si elle «lâchait» le Polisario. Je lui rappelai que l'Algérie est l'un des rares pays qui ne roule pas uniquement pour ses intérêts et que les principes peuvent nous étouffer parfois, nous ne changerions jamais ! Et ceux qui inventent des histoires aujourd'hui, comme celle d'un Boumediène s'opposant à la marocanisation du Sahara par «jalousie», «pour avoir sa part du gâteau» et «s'ouvrir un accès sur l'Atlantique», ceux-là sont soit des menteurs, soit des ignorants de la réalité. La vérité est que Hassan II avait proposé à Boumediène le partage du territoire sahraoui en insistant justement sur l'avantage d'un «accès sur l'Atlantique». Boumediène avait refusé : l'Algérie, fille d'une décolonisation héroïque, inscrite à jamais dans l'histoire des peuples, ne pouvait coloniser, à son tour, un pays étranger !
Voilà la vérité et elle découle des principes du 1er Novembre et des valeurs révolutionnaires qui ont marqué le parcours de ce rebelle. Et c'est probablement l'une des raisons qui avaient poussé, ce jour-là, Hassan II à nous parler de Boumediène comme d'un «excellent joueur d'échecs» dont il avait apprécié les qualités au cours des nombreuses joutes qu'ils s'étaient livrées !
Je sais que ceux qui ne portent pas Boumediène dans leur cœur – et ils ont leurs arguments – m'attendent au tournant et qu'ils vont détourner la question en citant d'autres situations où le Président défunt n'aurait pas agi selon les canons de la démocratie universelle. Je leur demande de faire une pause pour revoir la question sahraouie à l'aune du droit international et d'oublier qu'un certain Boumediène en fut le défenseur ardent, comme Bouteflika d'ailleurs, qui était son ministre des Affaires étrangères. Car, quand l'Histoire est agressée et que nous avons, en notre possession, des éléments et des témoignages qui peuvent rétablir un pan de vérité, il ne faut pas se taire...
Répondre à l'invective, aux fausses accusations, à ceux qui entretiennent ce climat de tension permanente entre les deux pays, est un devoir patriotique qui échoit, en premier, à ceux qui dirigent le pays. Il est vrai que certains, parmi nous, pensent que la meilleure réponse à cette agitation stérilisante est de rester calme. Ils nous disent que l'Algérie défend la position de l'ONU. Et, à chaque fois qu'elle le fait, le Maroc croit que c'est une attaque contre le royaume. Là-bas, la manipulation est telle autour de cette question que la majorité des Marocains pensent sincèrement que reconnaître un droit établi par la communauté internationale est une trahison !
Revenons chez nous : il existe aussi une tendance qui préconise de répondre fort aux attaques mesquines qui viennent de nos voisins de l'Ouest. Pas d'attitude belliqueuse, mais notre voix pour nous défendre contre l'infamie et rétablir la vérité doit se faire entendre jusqu'aux îles Canaries ! Justement, si Boumediène était là, nous aurions accouru devant nos télés et branché notre chaîne unique, pour entendre le langage des justes et une fierté toute nouvelle aurait parcouru les chaumières et les villes... il nous manquera toujours cette voix surgie des fins fonds de la campagne guelmoise, porteuse de l'âme rebelle de nos ancêtres, cette voix qui, jadis, faisait trembler les murs des palais de Hassan II !
M. F.

(*) Chronique parue le 13 novembre 2014 sous ce même titre.

 


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