De Rabah Driassa à Cheb Khaled



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Polémique d’une rare virulence provoquée par notre star nationale, j’ai cité l’immense Cheb Khaled. L’artiste nous a habitués à des sorties iconoclastes suivies, chaque fois, de critiques à la limite de la correction de la part des milliers de fans qui se sentent floués, « trahis » par leur idole. Son mariage avec une Marocaine aurait pu être d’une grande opportunité pour le raffermissement de liens profonds entre deux peuples qui partagent un gros héritage culturel commun. Artiste jusqu’au bout des ongles, il aurait été très inspiré de transcender des contingences dans lesquelles il n’est pas impliqué et confirmer l’adage qui dit « le poète a toujours raison qui voit plus loin que l’horizon… ». A-t-il manqué de vigilance pour avoir chanté le Sahara marocain, s’était-il fait piéger par des conseillers très au fait des enjeux et surtout désireux d’exploiter son aura et l’impact de ses chansons ? N’en déplaise à l’Oranais, les traquenards guettent toujours les vedettes de son envergure. Il lui est aussi reproché une chanson à la gloire de l’équipe de football du Maroc surtout au moment où son équipe à lui traversait une période difficile. Khaled inconscient ?  
Hier, il a récidivé et de manière plus ostentatoire dans le contexte de crise aggravée de l’Algérie, son pays, avec le Maroc et l’assassinat d’innocents routiers, condamnés à faire des milliers de kilomètres par route pour subvenir aux besoins de leurs familles. S’afficher avec les ministres du Makhzen, et avec ce sourire béat, est bien plus qu’un crime de lèse-majesté, un manque de respect aux Algériens qui l’ont porté au pinacle. Une image traîtresse qui joue contre lui. Sans vouloir l’enfoncer outre mesure, brandir la nationalité marocaine offerte est une plaisanterie de mauvais goût. Ce qu’il ignore peut-être est que les services du roi en font une politique tendant à dépouiller l’Algérie du meilleur de ses fils. Sans empiéter sur la liberté de choix des uns et des autres, ce type d’offrande, pensée et réfléchie dans les hautes sphères, est un cadeau aux relents nauséabonds. Bien sûr, notre Khaled national n’est pas le seul à avoir succombé aux chants des sirènes du Makhzen.
L’insignifiant chanteur émigré, Faudel, use et abuse de la brosse à reluire depuis qu’il s’est découvert « marocain de cœur et « algérien sur papier », autrement dit par accident. Il le déclame chaque fois à la faveur d’une invitation au pays de sa majesté. D’autres artistes bien de chez nous reviennent avec la nationalité marocaine en poche après une tournée de show-biz. Bientôt Khaled, Marocain d’origine algérienne ? C’est le but ultime des maîtres à penser ! Exception qui confirme la règle, il se trouve des Billal qui n’ont pas succombé à la propagande. L’on aurait pu rester dans cet appel du cœur du défunt Rabah Driassa, au lendemain de l’agression marocaine de 1963. Il avait chanté la fraternité des peuples d’Algérie et du Maroc, unis contre tous ceux qui veulent semer la division et pousser à la confrontation armée, « Marocain, toi et moi sommes frères et non ennemis ». 
Et comme en écho à la chanson des années soixante, le peuple marocain, en 2019, avait chanté, dansé aux victoires de l’équipe nationale en Coupe d’Afrique. Au grand dam du Makhzen que cette ferveur populaire authentique faisait rager. À bon entendeur…
Brahim Taouchichet
 


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